• ACE FREHLEY

     Retour vers le futur

    Rattraper le temps perdu, c’est l’étonnant défi réussit par Ace Frehley. Alors que Kiss n’a plus sorti d’album studio depuis Monster (2012), son ancien guitariste est revenu à ses principes originels. En cette fin d’été, il sort un second disque de reprises sur lequel il rend hommage aux guitaristes des 60’s qui lui ont donné envie de devenir musicien, aux héros des héros du rock. Le Spaceman a profité de la promo d’Origins Vol. 2 pour nous livrer quelques exclusivités. [Entretien avec Ace Frehley (Chant, guitare) par Philippe Saintes - Photos : DR – Deadly Pix]

    ACE FREHLEY promo Origins Vol. 2

    Ace, l’idée des « Origins » est de rendre hommage à tes artistes préférés, ceux qui t’ont poussé à prendre un instrument quand tu étais un ado du Bronx ?

    Exact. j’ai choisi des morceaux qui me touchaient. J’ai appris à jouer de la guitare en écoutant Jimi Page, Jeff Beck, Eric Clapton, Jimi Hendrix, Keith Richards et George Harrison. Tous m’ont inspiré et enrichi ma carrière musicale. C’est le second disque d’une trilogie que je veux dédier à ces musiciens. Bien sûr, c'est délicat car on refait quelque chose qui a déjà été fait et que le public a aimé. Le but n'est pas de dépasser les originaux, mais de faire connaître les titres aux nouvelles générations et qu'ils perdurent. Les reprises ont toujours existé, elles font partie de l'essence même de la musique.  Je pense que les fans apprécieront davantage ce deuxième volume car il y a plus d’énergie.

    Ton album sort le jour du 50è anniversaire de la disparition de Jimi Hendrix. On trouve une « cover » très réussie de « Manic Depression » en duo avec Bruce Kulick. Votre collaboration remonte-t-elle à la Kiss Kruise 2018 ?

    Nous sommes amis depuis longtemps mais c’est vrai, Bruce a manifesté l’envie de travailler avec moi lors de cette croisière. Nous sommes tous les deux fans d’Hendrix et je lui ai proposé de choisir un titre. Il a instinctivement proposé « Manic Depression » qui est également l’une de mes chansons préférées de Jimi. Ce  lien musical nous unit. Bruce exécute un solo qui tue avec une Stratocaster Floyd Rose. C’est une des plus belles collaborations sur l’album. Bruce est incontestablement le meilleur guitariste qui m’a remplacé dans Kiss. Ce n’est pas un copiste comme Tommy Thayer (il rit).  

    Autre guitariste invité, John 5 (Rob Zombie, Marilyn Manson). Ce dernier possède une incroyable collection d’objets sur Kiss. C’est aussi l’un de tes plus grands fans…

    Moi, j’ai vite sympathisé avec ce garçon. On s’est rencontré alors que je répétais pour la « Reunion Tour » avec Kiss en 1996. Il est tellement enthousiaste. C’est un plaisir de travailler avec lui. Il a amené son talent sur le solo de « I’m Down ». J’adore aussi notre duo sur « Politician ». Nos guitares se chevauchent comme on peut l’entendre avant le fondu enchaîné. Il y a une complicité naturelle entre-nous.

    La présence de Lita Ford n’est pas une surprise, elle était déjà présente sur le morceau des Troggs « Wild Thing » figurant sur le Vol. 1.

    Je connais Lita depuis l’époque des Runaways. Son groupe a fait la première partie de Kiss dans les années ’70. Je suis aussi ami avec Jackie Fox, la bassiste. Lita fut un choix naturel. Nous avons passé le week-end chez moi pour travailler sur sur « Jumpin’ Jack Flash ». Elle a toujours une voix incroyable.

    Est-il vrai que ta reprise de « Space Truckin’ » (Deep Purple) devait à l’origine se trouver sur Anomaly (2009) ?

    Oui. J’avais enregistre une version il y a plusieurs années mais le label avait opté pour « The Joker » (Steve Miller Band) à la place. J’ai réenregistré les voix et les soli  et le résultat final est très satisfaisant. 

    Tu as choisi d'interpréter la chanson « 30 Days In The Hole », l'une des plus connues de Humble Pie avec Robin Zander (Cheap Trick) au chant. Pourquoi? 

    Je suis un fan absolu de Steve Marriott. Comme je n’ai pas un registre vocal très extensible (il rit), j’ai envoyé à Robin les pistes de bases sans la voix. Il m’a dit ‘Ouah, je veux faire ce morceau avec toi !’ J’étais très flatté qu’il accepte d’ajouter sa pièce à l’édifice.

    ACE FREHLEY, Deadly Pix 1

    En guise de bonus, tu proposes une nouvelle version de « She » (Kiss). Le solo du morceau d’origine est inspiré du « Five To One » des Doors.

    Je ne m’en suis pas inspiré, je l’ai carrément ‘volé’ (rires) à Robby Krieger qui en est l’auteur. C’est un passage absolument génial. Je ne pense pas que cela soit un mal. De tous temps des artistes se sont appropriés des idées qui n’étaient pas les leurs. Il faut bien débuter par quelque chose et puis on évolue et on progresse en tant que musicien. Beaucoup de guitaristes ont copié mon style et j’en suis flatté. J’adore jouer « She » en concert. Sur la nouvelle version, je joue le solo en harmonie avec Jeremy Asbrock (Thee Rock N’Roll Residency). 

    A propos de la reprise des Beatles « I’m Down », est-il vrai que Ringo Starr a émis le souhait de te voir rejoindre son All-Starr Band dans les années ’90 ?

    En effet. J’ai reçu un appel de son manager. Il souhaitait que je parte avec Ringo en tournée malheureusement, j’avais de sérieux problèmes à une main suite à un accident. Je n’étais pas en mesure de m’en servir et donc de jouer de la guitare. J’ai décliné l’invitation la mort dans l’âme. J’ai acheté le 45t de « I Want To Hold Your Hand » lorsque j’avais 15 ans. C’est cette chanson qui m’a entraîné dans ce formidable voyage musical. Je n’aurais jamais imaginé à l’époque recevoir une invitation d’un Beatle pour jouer avec lui. Et pourtant, cela a bien failli se faire. 

    Si tu avais la possibilité de grimper dans la machine à remonter le temps et d’intégrer le line-up de tes rêves, quel serait-il ?

    John Bonham à la batterie, John Paul Jones à la basse et Robert Plant au chant (rires). Je serai  Jimi Page, l’une de mes idoles.

    Que devient le morceau de Blues enregistré avec Eric Singer (batteur de Kiss) lors des sessions de Spaceman ?

    Il figurera sur mon prochain album studio. Je dois juste refaire les parties vocales. Cette chanson s’intitule « Empty Bed Blues ».  J’ai déjà trois morceaux de prêt. Je pense inviter quelques ‘guests’, notamment mon vieil acolyte Anton Figg (batterie, Frehley’s Comet, Joe Bonamassa). Je suis revenu habiter sur la côte Est, pas très loin de chez lui. Pour le reste, je n’ai pas encore d’idées bien précises, j’aime faire les choses de façon spontanée. Dès que la pandémie sera finie, je repartirai en tournée. En attendant, j’enregistre, je compose, j’écris chaque jour une page pour mon second livre, je construis un nouveau home studio, je donne de nombreuses interviews par téléphone ou via Zoom. Je n’ai jamais été aussi actif. Cette année, ça fera quatorze ans que je suis sobre. J’essaye juste de profiter des bons moments.

    « J’aimerais enregistrer un album de vieux blues entièrement acoustique pour élargir ma palette. »

    Ton ancienne épouse Rachel vend sur internet des casettes avec des enregistrements inédits et des démos. Quel est ton sentiment ? Tu ne crains pas que tes archives soient dispersées ?

    Cela ne me concerne pas. J’ai conservé toutes les bandes. J’ai au total deux cents casettes audio analogiques rangées dans un road-case. Cela représente des heures d’enregistrements. Je compte sortir un boxset et rendre justice à ces chansons mais je dois avant explorer cette somme impressionnante de documents puis transférer le tout vers des disques durs. Je vais y passer au moins trois ou quatre ans.

    As-tu aussi conservé les bandes de Molimo, ton premier groupe officiel ?

    Oui. C’est la formation de prog-rock dans laquelle j’ai joué avent de rejoindre Kiss. Nous avions signé un contrat avec la maison  de disques RCA en 1971 mais l’album n’a jamais vu le jour. J’ai brièvement poursuivi ma carrière avec le bassiste (Dave Polinski) et le batteur (Barry Dempsey) au sein d’un groupe de reprises pour gagner de l’argent en tant qu’artiste.

    ACE FREHLEY, Deadly Pix 2

    En parlant de Kiss, que penses-tu du projet « Soul et R’n’B» de Paul Stanley ?

    Si Paul est heureux en interprétant ce style de musique, alors je suis heureux pour lui bien que cela ne soit pas ma tasse de thé. Je sais qu’il est branché « Motown ». Nous avons chacun une autre facette. De mon côté, j’aimerais enregistrer un album de vieux blues entièrement acoustique pour élargir ma palette. L’objectif est de se faire plaisir en jouant de la musique. C’est ça l’esprit rock !

    En revanche Peter Criss se fait très discret. As-tu des nouvelles récentes ?

    J’ai voulu intégrer Peter à l’album Origins Vol. 2, et l’ai invité à me rejoindre sur scène lors d’un concert dans la région de New York mais il souffrait de l’épaule et n’était pas à 100%. Il a poliment refusé les deux fois.  Nous avons été tous confrontés à un problème de santé.

    Les fans peuvent-il encore espérer voir le line-up originel de Kiss sur scène ou en studio ?

    Je n’ai pas été approché et si on me le proposait, je ne le ferais certainement pas gratuitement (il rit). Seuls Paul et Gene ont la réponse. Je regrette encore leur attitude lors de la cérémonie du Rock Hall Of Fame en 2014. Nos fans attendaient avec impatience de voir les quatre membres d’origine sur une même scène interpréter deux ou trois morceaux. Le monde entier regardait la cérémonie à la télévision mais cela ne s’est pas fait. Paul et Gene ont tout gâché à cause de leur entêtement. Je pense que cela remonte à notre concert Unplugged pour MTV avec Bruce et Eric. La demande a été si forte qu’elle a débouché sur la Reunion Tour en 1996. Le succès fut colossal. Paul et Gene ne souhaitent pas revivre le même scénario. Ils ne jurent que par la formation actuelle mais ce n’est pas l’héritage de Kiss. Ils ne donnent pas non plus satisfaction au public qui veut entendre de nouvelles compositions. C’est une erreur !  Kiss est devenu une grande entreprise mais a oublié l’essentiel : enregistrer des disques ! Si je reviens dans le groupe, un album verra le jour car je n’arrête pas de composer. Pour Spaceman, J’ai écrit deux chansons avec Gene en une après-midi. Il est temps de remercier nos fans et de leur faire ce cadeau avant de boucler la boucle.  

     ACE FREHLEY  Origins Vol. 2 cover

    ACE FREHLEY

    Origins Vol. II  

    SPV/Season Of Mist

    Que Ace Frehley s’amuse en interprétant les morceaux de sa jeunesse ne fait pas l’ombre d’un doute. C’est surtout le choix des titres qui est intrinsèquement intéressant. On connaît par cœur les morceaux éternels  « Lola » (Kinks), « I’m Down» (Beatles) ou « We Get Out Of This Place » (Animals) mais nettement moins le « Never In My Life » de Mountain, « Kicks » le tube de Paul Revere & The Raiders ou « Politician » de Cream.Bien entendu, le guitariste s'est réservé le meilleur rôle et sa six-cordes illumine l'ensemble du disque. Toutefois, il ne faut pas passer sous silence les quelques guests de luxe venus donner du médiator ou de la voix à l’image d’une Lita Ford à l’aise sur « Jumpin’ Jack Flash » des Rolling Stones, de Bruce Kulick brillant soliste sur « Manic Depression » le bijou d’Hendrix, de Robin Zander qui s’en tire avec les honneurs sur « 30 Days In The Hole » d’Humble Pie sans oublier le batteur Matt Starr (MR. Big). Si la plupart des chansons sont reproduites fidèlement, le guitar hero parvient à personnaliser des morceaux comme « Space Truckin’ » ou « Good Times Bad Times » de Led Zep en apportant des modifications au niveau des textes. Apprécier ce disque, c’est une affaire de bon goût même si le concept des reprises n’est en rien « original ». Finalement, les Origins de Frehley c’est comme le steak sauce béarnaise, une saveur identifiable mais qui fait son effet à chaque fois. [Ph. Saintes] 

     

     

     

    votre commentaire
  • HOUSE OF LORDS : New World cover

    HOUSE OF LORDS

    New World - New Eyes

    Frontiers Records

    Lancé par Gene Simmons (Kiss) à la fin des années ’80, House Of Lords a fait du chemin puisqu’il s’agit déjà de son 10è album. Aujourd’hui, la maturité a fait son œuvre. Oh bien sûr, du line-up d’origine ne reste que le seul James Christian (chant) ! Sa formation n’a jusqu’à présent rencontré qu’un soutien d’estime, prodigué par des connaisseurs, mais néanmoins mérité. Il l’est plus encore aujourd’hui avec New World – New Eyes, qui marie dans la joie et l’allégresse les mélodies les plus captivantes à des guitares résolument hard et énergiques (chapeau à Jimi Bell). La force de cet album est de savoir proposer des tempos enlevés (« The Both Of Us », « Chemical Rush », « The Summit ») et des titres plus standardisés FM (« Change », « Perfectly », « We're All That We Got », « The Chase »).  Sur le plan de l’inspiration, les musiciens ne rencontrent aucun problème : ils délivrent le meilleur. Les onze compositions de ce disque reflètent le plaisir de jouer (Tommy Denander et Robin Beck, les complices de toujours, sont évidemment présents) et la volonté permanente de garder l’auditeur en haleine grâce notamment à des refrains imparables. Chaque écoute est une découverte, tant le travail effectué en studio avec la complicité du producteur Mark Spiro (Giant, Bad English, Reo Speedwagon, Kansas, Mr Big, Winger) est dense.  Ce New World – New Eyes est une vraie palette de délices pour les fans. [Philippe Saintes]

     

     

    votre commentaire
  • DUKES OF THE ORIENT

    Freakshow

    Frontiers Records

    Ce deuxième opus du projet John Payne (ex-Asia, GPS) / Erik Norlander (Last In Line, Lana Lane) sonne moins progressif que le premier album éponyme sorti en 2018. Il est par contre plus aventureux. Le saxophone introduit de façon régulière, ne dérange pas et donne un côté un peu plus pop à l'ensemble. Guthrie Govan (guitare) et Jay Schellen (batterie), qui formaient avec Payne le groupe GPS, sont une nouvelle fois de la partie. Si les compositions sont accrocheuses, on ne trouve cependant pas d'hymnes ASIAtiques. C'est vrai que la voix de John Payne est plus éraillée que par le passé, on ne peut pas être et avoir été. Le genre est épuré, complexes certes, mais la maîtrise technique individuelle des musiciens confère un sentiment d’aisance naturelle très agréable. Les titres se succèdent harmonieusement, l’interprétation est rigoureuse, brillante mais pas démonstrative. Les fans d'AOR, de prog et d'Asia attendent désormais avec une certaine impatience la tournée de ces « grands ducs ». [Martial Jonard]


     

     

     

    votre commentaire
  •  BLUES PILLS : Holy Moly !

    BLUES PILLS

     Holy Moly !

    Nuclear Blast / PIAS

    La prestation bridée du guitariste Dorian Sorriaux sur le second album de Blues Pills en 2016, conjuguée à la sortie d’un premier EP solo en 2018, avait mis la puce à l’oreille des professionnels de la profession. L’avenir post-Covid de Blues Pills s’écrit donc avec Zack Anderson à la guitare, qui a laissé sa place de bassiste à Kristoffer Schander. Le quartet se relève et se révèle : les médias, arbitres des élégances qui ont les yeux de Chimène pour la chanteuse Elin Larsson, la retrouvent sur « Proud Woman » en concurrence victimaire avec les (anti)racistes des émeutes et manifestations de juin 2020. Convergence des luttes ? Plus d’un demi-siècle après le « Respect » d’Aretha Franklin, la cause féministe semblait pourtant entendue. Second morceau scénographié sur YouTube, « Low Road » délivre une formule soul longtemps macérée dans l’ombre (cf. l’illustration de pochette de Daria Hlazatova), expurgée des poncifs Sabbath / Zeppelin des camarades rétro-rock du même label. Enfin, pour battre sa coulpe après le report de la sortie de Holy Moly au 21 août, Blues Pills a gracieusement mis en ligne son showcase de la série Dahaim Dabei, dans un environnement analogique en rupture avec ce monde affamé de jeunisme. [Jean-Christophe Baugé]

     

     

    votre commentaire
  •  DEEP PURPLE

    Solide comme un "rock" 

    Le vingt et unième album studio de Deep Purple a été unanimement salué par la critique. Il constitue la troisième partie d’une trilogie produite par Bob Ezrin (Pink Floyd, Kiss, Alice Cooper). Il marque surtout un retour aux digressions euphoriques. Whoosh! balance en effet entre références classiques et contemporaines avec un zeste de prog et une bonne dose de technique. [Entretien avec Steve Morse (guitare) par Philippe Saintes  - photos : Ben Wolf et Deadly Pix]

    DEEP PURPLE : Whoosh!  

    Steve, comment se passe ton quotidien en période Covid-19 ?

    Je m’occupe beaucoup sur internet. Je reçois un grand nombre d’interviews par email. J’enregistre aussi des idées de chansons. Je n’ai jamais passé autant de temps devant mon ordinateur. C’est très compliqué d’organiser et de structurer un spectacle ou de planifier des répétitions actuellement. Je doute que nous pourrons encore tourner cette année pour promouvoir le nouvel album. Nous savons à quel point la crise du Covid-19 a impacté les intermittents du spectacle, le groupe a décidé de recruter des fonds au profit des équipes de tournée. La situation est catastrophique non seulement pour toutes les personnes qui nous accompagnent sur la route mais aussi les tourneurs, les fournisseurs d’éclairage et d’équipements sonores. Des roadies nous accompagnent depuis des dizaines d’années. Sans eux il n’y a pas de shows. Certains sont âgés et n’ont pas d’autres alternatives dans la vie. Nous sommes une grande famille.

    Abordons le sujet principal, à savoir le nouvel enregistrement. Trois mots peuvent le résumer : émulation, diversité et spontanéité…

    J’aime ce que tu viens de dire mais c’est difficile pour moi de donner un avis personnel car l’album est encore très frais. Je n’ai pas le recul nécessaire pour l’analyser objectivement. Reviens me poser la question dans quelques mois. Je souhaite que les gens creusent vraiment notre album et qu’ils passent le mot à d’autres personnes. Nous avons travaillé sur de nombreuses idées lors des sessions d’écriture il y a un an et demi.  Je me rappelle du rôle joué par chacun dans l’élaboration des morceaux, des changements apportés par rapport à une idée de base, de nos jams… Whoosh! n’est pas un remake des deux réalisations précédentes  Now What?! (2013) et Infinite (2017) mais on retrouve le même enthousiasme. Nous avons tout d’abord effectué quelques sessions en Allemagne pour des échanges entre musiciens et commencer à travailler. Quelques mois après, le groupe s’est retrouvé dans le studio de Bob Ezrin à Nashville. Personne ne savait à l’avance ce qui allait sortir. Nous étions placés dans des pièces différentes mais chacun pouvait voir l’autre derrière de grandes vitres. J’apprécie vraiment cette façon de travailler old-school.

    On a le sentiment qu’il s’agit de votre disque le plus « progressif »…

    C’est vrai. J’y suis peut-être pour quelque chose (il sourit). Deep Purple a toujours conservé ses racines hard rock mais continue d’expérimenter. Nous ne nous sommes pas dit : « nous allons faire un disque de rock prog ». Ce n’est qu’au moment du mixage que nous nous sommes aperçus à quel point il l’était. Même si la base est très rock, on trouve des éléments déroutants. Je ne suis pas mécontent d’avoir exploré d’autres gammes de sensibilité. Je n’essaie pas d’influencer les autres. Nous avons un fonctionnement réellement démocratique. J’apporte mes influences mais c’est le groupe qui décide. Le processus reste très naturel. Don (Airey) et Roger (Glover) ont aussi apporté des musiques et des arrangements. Même Ian Paice apporte son point de vue. On parvient encore à s’étonner les uns les autres. C’est même ça qui nous fait avancer.

    DEEP PURPLE live 

    Tu irais jusqu’à dire que vous avez chacun le même apport créatif ?

    Tu ne peux pas avoir une contribution égale sur un disque. Je viens avec des harmonies de guitares, des riffs. Ian Gillan écrit la majorité des textes, Roger apporte des mélodies vocales et ainsi de suite. Tout le monde essaie d’apporter de nouvelles choses et c’est difficile de ne pas en tenir compte. 

    Et vous vous mettez facilement d’accord ?

    Oh non (sourire). C’est la raison pour laquelle nous avons engagé Bob Ezrin. Sa méthode est de retirer le meilleur de chaque musicien. Il me dit souvent : ‘Steve, je souhaite que tu évites de reproduire ce que tu fais avec Dixie Dregs ou Flying Colors’. C’est un plaisir d’écouter ses conseils. Cela nous a enlevé une certaine pression. Bob exige de la spontanéité. Il est aussi à la pointe de la technologie. En studio, il peut être considéré comme un membre essentiel de notre petite bande. C’est important d’avoir une personne extérieure, qui a un regard critique et objectif pour éviter les amertumes. Bob est là pour apporter la touche finale. Personnellement, j’aurais donné davantage de résonance à la section rythmique lors du mixage et opté pour d’autres soli sur quelques titres mais je ne suis qu’un cinquième du groupe. Chaque membre doit œuvrer non pas individuellement mais avec tous les autres. Je trouve que plus nous vieillissons, plus nous prenons du plaisir. On a tous l'air d'avoir une énergie infatigable.

    Il y a des parties diaboliquement compliquées sur « Nothing At All ». Ce n’est pas de l’arrogance. Cela démontre plutôt votre volonté de repousser les limites, les possibilités.

    Absolument. J’ai été surpris par le résultat. Ian Gillan m’a dit : « J’adore ta partie de guitare ! » « Ah oui, cool ! ». J’aime répondre à la ligne vocale. Cela donne une dynamique à la chanson. Les interventions guitare-claviers sur la partie centrale sont comme les mélanges d’un Buck’s Fizz (cocktail). Don et moi, on adore ça ! C’est une chanson différente du répertoire de Deep Purple que ce soit au niveau du feeling ou des arrangements mais elle a aussi un côté puissant.

    Don Airey rayonne sur l’album. Il y a une véritable alchimie particulière entre vous deux.  Es-tu d’accord avec cette analyse ? 

    Don est non seulement un artiste exceptionnel mais aussi une personne très intelligente, capable de mémoriser la musique plus rapidement que nous tous. C’est l’un des musiciens les plus fluides en improvisation. J’aime le côté aventureux de Don. Nous nous affrontons l'un et l'autre dans une sorte de compétition très amicale. Nos jams avec Ian Paice sont intéressantes sur le plan créatif.

    DEEP PURPLE live (3)

    Chaque morceau de Whoosh ! possède des textes élaborés. Cela signifie que vous souhaitez faire passer de vrais messages…

    Qui sait ? Peut-être avons-nous été influencés par le contexte actuel : l’économie, le climat, la politique… Ian (Gillan) s’est interrogé sur les nombreux paradoxes de l’existence. Il aborde souvent des thèmes qui le concernent sur le plan personnel.

    "Les interventions guitare-claviers sur la partie centrale de 'Nothing At All' sont comme les mélanges d’un Buck’s Fizz (cocktail anglais). Don et moi, on adore ça !"

    Combien de titres allez-vous jouer en live ?

    Trois chansons ont selon moi le potentiel pour devenir des classiques de Deep Purple. « Throw My Bones » a un côté accrocheur. C’est également le cas de « The Power Of Freedom » et « Dancing In My Sleep », des musiques plus faciles pour capter l’attention du public et ne pas faire baisser l’ambiance durant le set. Une fois encore, le choix revient au groupe. Ian Gillan choisira ensuite parmi nos propositions, les titres sur lesquels il se sent le plus à l’aise vocalement. C’est toujours comme cela que nous fonctionnons. Le setlist est habituellement finalisée la veille du premier concert.

    Vous avez beau être plus que sexagénaires, Deep Purple reste une machine à tourner. Le groupe a joué presque partout dans le monde. Vous reste-t-il cependant des terres à conquérir ?

    J’aimerais davantage tourner en Afrique et dans les pays de l’Est ainsi que dans de plus petites villes en Amérique du Sud. Toutefois, je ne peux pas me plaindre du carnet de route de Deep Purple. C’est un choix et un mode de vie. En tant que ‘performers’ nous avons besoin d’être sur la route. Rencontrer le public reste un moment magique. L’enthousiasme est tel que parfois,  on ne sait plus dans quel pays nous nous trouvons. L’énergie de la foule est la même partout. La musique possède un merveilleux pouvoir d’unifier.

    DEEP PURPLE live (3)

    Si tu devais résumer ta carrière en cinq chansons. Quels titres choisirais-tu ?

    « Take It To The Top », un instrumental de Dixie Dregs, « Nothern Lights » interprété en duo (guitare-violon) pour l’album Free Call. « Sometimes I Feel Like Screaming » qui est ma première composition pour un album de Deep Purple (Purpendicular). « Uncommon man » un titre hommage à Jon Lord que l’on trouve sur Now What?!  Don et moi avons improvisé l’intro de ce morceau. Ce fut une expérience interactive mémorable. Enfin, « A Place In Your World » de Flying Colors, un rock mélodique mais intense. J’ai toujours aimé ce type de composition…

    Tu as d’autres passions en dehors de la musique. Tu es ainsi un pilote d’avion chevronné. As-tu déjà pris les commandes d’un appareil avec les autres membres de DP comme passagers ?

    Nous avons un excellent capitaine allemand pour cela. Il m’a déjà proposé de prendre les commandes mais au pont de vue des assurances, c’est risqué. Je n’ai plus ma licence de pilote de ligne. Je vole régulièrement à bord d’un appareil léger pour mon plaisir. J’éprouve des sensations différentes de la scène. C’est relaxant. Je suis fasciné par les aéronefs depuis l’enfance. La noblesse du ciel nous apprend à rester humbles !

    J’ai eu l’occasion d’interviewer tous les membres du line-up actuel de Deep Purple, excepté Roger Glover. Promets-moi d’enregistrer un autre disque avec le groupe pour me permettre de discuter avec lui la prochaine fois.

    On les traite de dinosaures mais ces types viennent d’une autre planète sur laquelle les gens vivent jusqu’à 300 ans au moins. Ils ont décidé de nous rendre visite sur cette terre. Je serai mort depuis longtemps quand Deep Purple arrêtera d’enregistrer des albums, crois-moi. (Rires)   
     

    DEEP PURPLE : l'interview de Steve Morse

      DEEP PURPLE

    Whoosh! 

    EarMusic/Warner Music

    Whoosh! Déjà le nom amuse. Il y a du subliminal là-dessous. Ainsi, la plage d’ouverture « Throw My Bones »  est une réflexion sur la carrière de Deep Purple.  L’auditeur ne tombera pas sur un os avec ce  premier titre direct taillé pour la scène.  « Drop the Weapon » montre une facette plus exotique au contraire de « We’re All The Same In The Dark » du Purple pur jus sur lequel Steve Morse étale son époustouflante dextérité. « Nothing At All » montre qu’après plus de 50 ans de carrière, le groupe continue d’explorer de nouveaux horizons musicaux.  Vocalement, Ian Gillan a trouvé sa zone de confort, donc pas besoin de brailler comme il le chante avec feeling sur « No Need to Shout ». « Step By Step » est une pièce musicale de très haut vol, magnifiée par la grande complicité entre Morse et Don Airey. « What The What » est une composition plus dansante et jubilatoire dans le style de feu Little Richard. On retrouve un terrain plus aventureux et captivant sur « The Long Way Round ». Dès les premières notes, on sent l’inspiration ! Suivent le fascinant « The Power Of The Moon », un rapide interlude musical (« Remission Possible ») et le surprenant « Man Alive » exécuté par un groupe au sommet de son art. Gillan utilise ici le même type de narration énigmatique employée sur « On Top Of The World » (titre d’Infinite). L’album se clôture avec deux chansons plus groovy : le dispensable instrumental  «  And the Address » exhumé du Deep Purple MK I et l’entraînant « Dancing in My Sleep » mené par un son futuriste. Ce 21è opus est-il le dernier de cette formation qui plane au-dessus de la masse ? Si c’est le cas, la révérence finale est magnifique, à la hauteur de la carrière de Paice, Glover & Co. [Ph. Saintes] 

     

     

    votre commentaire
  •  FM

    Le patient anglais

     Quel allait être l’après Atomic Generation ? FM plus FM que jamais, toujours là, où et quand on ne l’attend pas. Ce nouvel album est une autre merveille qui ne doit rien à personne et Steve Overland s’explique en exclu pour Classic Obs’. [Entretien avec Setve Overland (chant, guitare) par Philippe Saintes  - photos : Antonio Ayotis]

    FM 2020

    Steve, il y a des facettes multiples et colorées sur cet album. Du funk, de la soul, une touche de gospel, du blues et même des éléments électros sur « Ready For Me ». Il s’agit probablement de votre album le plus varié.  

    Tu as raison, Philippe. On retrouve des touches de tout ça sur le CD. Chaque titre de Synchronized a son propre ADN. « The Ghost Of You And I » par exemple a un côté country. Nous n’avons pas peur de sortir de notre zone de confort et d’expérimenter aujourd’hui. Il n’y a plus de  contrainte, de cadre fixé ou des balises. L’important est de rester sincère, entier et frais, en évitant la complaisance. J’aime la diversité de Synchronized.  Nous n’avions pas d’idée arrêtée au départ de l’enregistrement. Si une chanson était bonne on l’incluait sur le disque. « Superstar » ne devait pas s’y trouver initialement car il est arrivé tardivement mais nous sommes retournés en studio simplement parce qu’on adorait tous ce titre. Synchronized n’est pas un fourre-tout. Bien sûr, on ne peut pas s’empêcher de penser à Atomic Generation, qui a bien marché sur le plan commercial et peut-être parce que l’on se demande toujours si l’auditeur va aimer ce que l’on fait. Néanmoins, nous ne comparons pas systématiquement nos albums entre eux. Nous écrivons ce que nous aimons, sans pression.

    Vous avez désormais le contrôle de votre destinée. Ce ne fut pas nécessairement le cas dans les années ’80. 

    C’est exactement ça. CBS, Epic ou Chrysalis nous poussaient à devenir le nouveau Journey ou le nouveau Bon Jovi. Nous avons le contrôle de notre musique à présent. On fait ce que l’on veut et on va là où on veut. Le label Frontiers n’interfère pas dans le contenu ou notre orientation musicale. Les responsables se contentent de recevoir le produit fini et nous, nous encaissons le chèque à la fin de l’enregistrement. La confiance est un aspect important dans notre collaboration. Personne n’a à se plaindre jusqu’à présent. Le seul compromis est pour nos fans. Nous avons un devoir envers eux. C’est la raison pour laquelle nous écoutons leurs avis. C’est primordial d’avoir un lien avec les personnes qui achètent ta musique. Sans elles, on ne ferait pas ce magnifique métier depuis trente ans. Chaque chanson a une histoire pour le public.   

    Avec « Synchronized », le titre générique, vous tenez un nouveau tube à l’instar de « Killed By Love » sur le précédent opus. Ce sont des chansons qui restent dans la tête. Un air que vous voulez entendre encore et encore avec un refrain à faire trembler les murs… 

    FM aime produire des chansons avec de bons  gros refrains, que les gens retiennent facilement. L’accroche est le nerf de la guerre d’une bonne chanson pour moi. J’aime un rythme ‘catchy’ appuyé par une basse continue, groovy comme sur les hits de Michael Jackson « Beat It » ou « Billie Jean ». J’apprécie aussi les sonorités dansantes des années ’80, je pense aux mélodies identifiables de The Police.  C’est un plaisir de voir le public reprendre en chœur nos chansons pendant les concerts. Nous ne sommes pas des génies, on écrit juste des chansons « commerciales ».  

    A quoi fait référence le titre « End Of Day » écrit par Pete ? 

    Cette chanson parle de notre société autodestructrice. La réalité n’est pas brillante. Les évènements récents le démontrent bien. C’est un morceau plutôt heavy. Il a un côté dramatique aussi. La musique brutale se marie parfaitement avec le texte. Nous ne sommes pas un groupe à message habituellement. 

     

    FM Synchronized cover

     

    Avec le déconfinement, j’imagine que vous espérez bientôt reprendre la route pour défendre cet album.  

     

    J’adore interpréter sur scène les dernières compositions. Nous avons pris l’habitude d’insérer trois ou quatre nouveaux titres dans la setlist. Evidemment, vous entendrez toujours « That Girl » et les autres classiques de Indiscreet (Note : premier disque FM)  car cet album fait partie de notre histoire,  mais je trouve excitant d’interpréter de nouvelles chansons. J’aimerais ajouter cette fois « Synchronized », « Superstar » et la ballade « The Ghost Of You and I » dans une version piano-voix. C’est difficile d’établir une setlist. On en parle chaque fois entre-nous pendant des heures. Nous avions programmé une tournée en Europe et deux autres au Royaume Unis ainsi que la participation à deux croisières rock mais tout est reporté à 2021 en raison de la pandémie.  C’est très frustrant. Pour garder le contact avec nos fans, on organise régulièrement des Q&A sur la page Facebook du groupe. 

     

    « Depuis la reformation, FM bénéficie de nombreux passages sur les ondes au Royaume Uni. Je pense que c’est en grande partie dû au son moderne du groupe. » 

     

    FM a influencé de nombreux artistes. T’intéresses-tu à la scène musicale actuelle ?   

     

    Absolument. En partie grâce à mes enfants. J’aime Ed Sheeran par exemple. J’écoute parfois le top 40 sur BBC 2 ou des stations plus commerciales. Pour être compétitif aujourd’hui, tu dois écouter des choses actuelles. Indiscreet par exemple est un album de son temps avec une technologie complètement dépassée. Les méthodes d’enregistrement ont évolué comme la façon de consommer la musique. Ce serait stupide de notre part de ne pas en tenir compte. Nous avons la chance d’être massivement soutenu par les médias. Depuis la reformation, FM bénéficie de nombreux passages sur les ondes au Royaume Uni. Cinq de nos « single » ont eu droit aux honneurs des radios nationales. Je pense que c’est en grande partie dû au son moderne du groupe. Cela nous offre certainement de formidables opportunités. Il faut vivre avec son époque pour ne pas être banalisé.  

     

    FM 2020 (2)

     

    Avant FM tu as fais partie d’un groupe AOR culte avec ton frère (Chris), Phil Soussan (Ozzy Osbourne, Last In Line) et surtout le légendaire Simon Kirke (batteur de Bad Company et Free). Peux-tu nous parler de la genèse de ce projet… 

     

    J’étais un fan absolu de Free. Ado, c’était mon groupe favori avec Bad Company.  Chris et moi avons enregistré un premier album (Burning) sous le nom de Wildlife et avec d'autres musiciens, pour Chrysalis Records. Un deuxième disque était en projet mais le label a décidé de faire une pause. Nous avons eu la chance d’être repérés par Peter Grant, qui gérait à l’époque Swan Song, le label indépendant lancé par Led Zeppelin. Il désirait nous faire signer après avoir entendu une démo. Lui et Simon (Kirke) nous ont invités à le rejoindre à Londres. Mick Ralphs, le soliste de Bad Co était également présent. Il fut décidé que ce dernier produirait l’album. Tu imagines la claque. J’allais enregistrer avec mes idoles.. Nous avons commencé à répéter et à auditionner plusieurs bassistes, dont Neil Murray de Whitesnake mais c’est Phil Soussan qui, après avoir réussi avec brio une audition à Londres, fut engagé. Phil était aussi bon en studio qu’il ne l’était sur scène. Il assurait. La seule chose qu’il écrivit pour l’album est la version originale de « Shot In The Dark », chanson popularisée plus tard par Ozzy Osbourne. Inexplicablement, elle n’a pas été retenue pas plus que « Sunrise » le morceau qui nous a permis de signer un contrat professionnel avec Chrysalis. On avait trouvé un véritable esprit de camaraderie. Wildlife a enregistré un deuxième album éponyme dans le studio de Jimi Page et le résultat fut excellent. Nous avons ensuite tourné aux Etats-Unis avec le Michael Schenker Group. Là-bas, nous étions distribués par Atlantic. C’était énorme ! Le groupe n’a toutefois pas survécu à la disparition de Swan Songs Records en 1983 lors de la séparation de Led Zeppelin et les soucis de santé de Peter Grant qui s’était chargé jusque-là de toutes les négociations. Les deux albums de Wildlife ne sont disponibles qu’en K7 et en vinyle. Heureusement, nous sommes toujours détenteurs des droits. Ils devraient prochainement ressortir dans des versions remixées.  Simon et moi sommes restés de très bons amis. J’avais pris l’habitude de le voir jouer sur scène avec Bad Company. Ce fut encore le cas à Manchester lors de la dernière tournée du groupe. Il est toujours mon héros. Nous avons à nouveau collaboré il y a un an et demi sur l’album de Lonerider. L’influence de Free et Bad Co est particulièrement sensible. J’aimerai vraiment réaliser un deuxième disque avec ce projet.      

     

    Parle-nous de tes premiers pas sur la scène musicale.  

     

    Wildlife a été formé très tôt à Nortfolk avec de jeunes musiciens locaux. A l’origine le groupe s’appelait Bones et était fortement influencé par la musique de Free et Bad Company.  Le processus s’est mis en place lentement. On a bossé dur. Après des années d’apprentissage, d’écriture et de tournées essentiellement provinciales, nous avons commencé à nous produire dans les clubs de Londres.  Je devais avoir 17 ans à l’époque. C’est cependant lors d’un concert à Kinsley que nous avons été repérés par un représentant de Chrysalis. Tout n’est peut-être pas le fruit du hasard.   

     

    Steve Overland 2020

    Quel est le premier album rock que tu as acheté ? 

    Electric Warriors de T-Rex. J’avais mis de côté de l’argent pour m’offrir ce vinyle. C’était comme recevoir un cadeau à Noël. J’ai écouté le disque en continu. J’avais l’habitude de chaparder les vinyles de mon frère. Il était en avance sur moi. Il possédait des pépites comme Rockin The Filmore d’Humble Pie ou Abbey Road des Beatles. La découverte de ce dernier album fut un grand choc pour moi. Il reste mon album numéro 1 à ce jour.   

     

     

    Quels sont tes projets, Steve ?

     

    J’en ai beaucoup, honnêtement, Philippe. Je suis en pleine négociation avec Frontiers Records pour la réalisation d’un nouveau CD avec le groupe Groundbreaker. Mon nouvel album solo (Scandalous) sortira en août sur le label Escape Music. Il s’agit déjà du 5è opus d’Overland. On y retrouve des influences diverses, notamment des Doobie Brothers. Je suis content d’avoir pu enregistrer un album qui correspond à mes goûts musicaux sans interférence quelconque. Le titre « Changing Times » est une marque de respect pour tout le personnel médical qui a œuvré dans le monde entier pendant la pandémie. C’est aussi un hommage à toutes les victimes du Covid-19. Tonny Denander m’accompagne à la guitare. Nous avons écrit ensemble tous les titres de Scandalous. Il m’avait envoyé de nombreuses idées et des arrangements. J’ai composé de mon côté les mélodies et les textes. Brian Tichy (ex-Whitesnake et Dead Daisies) est à la batterie et Brian Anthony, notre bassiste/organiste, a mixé l’album aux Etats-Unis. Malgré le virus, je ne reste pas inactif et c’est bien comme ça ! 

     

     Overland scandalous cover

    FM se produira au ALL STAR FEST (20 et 21 novembre) à Anvers (B)

     

    votre commentaire
  •  

      BLACK SWAN

    Les Compères

    Le sympathique Jeff Pilson, plus connu en tant que bassiste de Dokken et de Foreigner, nous parle du nouveau supergroupe du label Frontiers, Black Swan, qu’il a formé avec ses potes Reb Beach (Whitesnake, Winger) et Robin McAuley (MSG, Survivor) ainsi que du flamboyant batteur Matt Starr (Ace Frehley, MR. Big). L’album Shake The World est le coup cœur Classic Rock du premier trimestre 2020. [Entretien avec Jeff Pilson (basse) par Philippe Saintes  - photos : Enzo Mazzeo]

     Black Swan Band

    Jeff, tu avais travaillé autrefois avec Robin et Reb. Black Swan était une opportunité de collaborer à nouveau ensemble ? 

    Tout à fait. Après une entrevue avec Serafino (Perugino), le boss de Frontiers, durant laquelle nous avons évoqué la possibilité de créer un nouveau projet, je suis parti en tournée avec Foreigner à l’été 2018. Nous avons partagé l’affiche avec Whitesnake dont Reb est l’un des guitaristes. J’ai immédiatement proposé à Reb de participer à cette nouvelle aventure. La complicité entre nous a été immédiate lors de l’enregistrement de Erase the Slate avec Dokken (1999). Nous avons gardé contact. Même remarque concernant Robin, un camarade depuis plus de trente ans.  J’ai été son témoin de mariage. Donc, j’ai effectivement eu la chance de travailler avec des artistes que je respecte énormément et qui sont des amis. L'alchimie entre nous, on en a à revendre. Cette complicité se retrouve d’ailleurs dans les chansons. Reb et moi avons créé la musique tandis que Robin a apporté sa contribution au niveau des textes. J’ai composé quelques refrains ainsi que les paroles de « Divided/United ». Black Swan est un vrai groupe. Nous avons été agréablement surpris par la réaction et l’engouement du public pour ce premier album. C’est très positif.

    Après avoir disparu des radars pendant plusieurs années, Robin McAuley effectue ici un retour fracassant sur le devant de la scène.

    Robin a mis beaucoup d’émotions dans les chansons. Sa voix est authentique et hors norme. Il a par exemple fait de « Divided/United » un morceau littéralement extraordinaire. C’est un artiste sous-estimé selon moi. Beaucoup l’ont classé dans la catégorie « chanteur de ballades » mais il a un registre plus varié comme en témoigne ce disque.

    Qui a proposé le nom de Matt ‘Fu Manchu’ Starr pour compléter le quatuor ?

    (Il rit) C’est Serafino. J’ai trouvé l’idée excellente. Son énorme talent est reconnu depuis longtemps mais nous n’avions jamais collaboré auparavant. Matt est arrivé à la fin de du processus mais il est  monstrueux à la batterie. On le sait moins mais c’est aussi un excellent chanteur. On aimerait jouer ensemble live malheureusement il est difficile de faire coïncider les agendas cette année. Ce serait très amusant connaissant l’humour de Reb en tournée. On pourrait peut-être envisager quelques concerts pour la sortie du deuxième album cependant, je ne peux rien promettre.

    Jeff Pilson

    Les textes de plusieurs chansons sont assez sombres comme notre époque en quelque sorte. 

    Nous ne pouvons pas nous empêcher de songer que la planète aurait besoin d'être secouée (“Shake The World”). Un changement profond des mentalités doit être engagé même si nous voulons rester positifs à la fin de la journée.

    Quels sont tes projets immédiats en tant qu’artiste mais aussi producteur ?

    Je travaille actuellement avec Steven Adler (ex-Guns’N Roses) et son groupe. Nous avons enregistré un titre dont le mixage est en cours. J’espère que cela va déboucher sur un disque complet. Je croise les doigts. J’espère aussi faire deuxième opus avec The End Machine (ex-Dokken). Nous sommes en pleine discussion. Et puis, il n’est pas exclu que je rejoigne Don et George sur l’une ou l’autre date du Dokken-Lynch Mob Tour, si l’opportunité se présentait. En attendant, je me réjouis de vous voir nombreux sur la tournée européenne de Foreigner !   (Note : cette interview a été réalisée avant le confinement)

    "J’ai effectivement eu la chance de travailler avec des artistes que je respecte énormément et qui sont des amis. L'alchimie entre nous, on en a à revendre. Cette complicité se retrouve d’ailleurs dans les chansons."

    Si tu devais choisir une chanson autobiographique, quelle serait-elle ?

    C’est une question tr ès profonde. Laisse-moi  réfléchir ! Probablement « Come Together (Beatles). C’est celle qui me vient directement à l’esprit.

    Le premier instrument tenu entre tes mains quand tu étais jeune ?

    Le violoncelle. J’étais en cinquième primaire. J’avais donc onze ans. Je n’ai appris à jouer de la basse qu’un an plus tard.

    La première chanson interprétée en public ?

    Le premier morceau que j’ai essayé de jouer et de chanter en même temps est « Born To Be Wild » de Steppenwolf. J’étais très enthousiaste au moment d’interpréter ce titre. Je m’en souviens parfaitement.

    Ton album favori. Ton numéro un ultime ?

    Revolver des Beatles suivi de très près par Close To The Edge de Yes et OK Computer de Radiohead. C’est définitivement mon top 3.

     

     Black Swan cover

    BLACK SWAN

    Shake The World

    Frontiers Records 

    Enregistré dans le studio de Jeff Pilson à  LA, Shake The World devrait rallier tous les amateurs de hard rock mélodique à sa cause. Le titre éponyme confirme notre impression qui n’est jamais démentie. Ces types jouent du rock parce qu’ils ne savent et ne veulent faire que ça. Tous les ingrédients sont-là. Guitares acides et nonchalantes, basse ronde, batterie mastodonte et une voix digne des plus grands. Pas de solos à rallonge ici mais un souci de l’efficacité maximale. Les morceaux sont à la fois inspirés et engagés. « Shake the World » parle du réveil des consciences, « Long Road To Nowhere » évoque sans tabou le problème de la drogue et « Johnny Came Marching » décrit le retour à la vie “réelle” d’un soldat. Et puis avec des compositions comme « Big Disaster », « Immortal Souls » ou « The Rock That Rolled Away », Black Swan montre qu’il n’est pas qu’un groupe éphémère qui s’attache à faire revivre le passé (malgré le clin d’œil à Queen sur « Divided/United »). On peut même lui prédire un avenir certain. [Ph. Saintes] 

    Retrouvez cet article dans Classic Obs' #5 (Mars-Avril 2020)

      

     

    votre commentaire
  •  BOC - Claasic

    BLUE ÖYSTER CULT

     Cult Classic +  Hard Rock Live Cleveland 2014

    Frontiers Records

    Le label Frontiers s’est donc acoquiné avec une figure de proue du « black-metal » US, dont la  saga a débuté il y a 47 ans, pour proposer une compil et un live en attendant sans doute un nouvel album en 2020. Cult Classic propose douze titres (+ deux instrumentaux) réenregistrés par le line-up actuel.  On trouve ici des versions remastérisées  de « Don’t Fear The Ripper », « Godzilla », « Burnin’ For You » et même « Astronomy » titre déjà retravaillé pour  le cultisme Imaginos (1988).  La seconde sortie est un live pur et dur dont la captation date du 17 octobre 2014. 17 chansons retracent la royale carrière du B.O.C. Si le groupe a connu quelques traversées du désert, il a cependant survécu aux chocs des modes et au poids des âges. Sa musique est toujours aussi fraîche en studio et en public. Il faut dire que Blue Öyster Cult a la coquille aussi solide que le rock ou les guitares d’Eric Bloom et de Buck Dharma, les deux membres historiques. Malgré son grand âge, cette huître-là peut être dégustée sans risque d’intoxication même si vous avez abusé de fruits de mer durant les fêtes. [Ph. Saintes] 

     

     

    votre commentaire
  •  REVOLUTION SAINTS : Rise

    REVOLUTION SAINTS

     Rise

    Frontiers Records

    Avant d’enregistrer un nouvel album et de partir en tournée avec le collectif The Dead Daisies (que vient d’intégrer Glenn Hughes), Doug Aldrich (guitare, ex-Whitesnake) et Deen Castronovo (chant/batterie, ex-Bad English et Journey) ont retrouvé leur camarade Jack Blades (Chant/basse, Night Ranger) et le compositeur/claviériste/producteur italien Alessandro Del Vechio, pour mettre en boîte Rise, troisième enregistrement studio de Revolution Saints. La formation n’a pas changé son fusil d’épaule musicalement. Son hard rock mélodique des années ’80 et ’90 fera toujours mouche grâce à un énergique titre éponyme, le remuant  « When The Heartache Has Gone », le mid-tempo « Price We Pay », les directs « It’s Not The End (It’s Just the Begining) » et « Higher », le très pop « Closer » ou l’irrésistible « Talk To Me » (avec la chanteuse Lunakaire en guest). Les compositions sont bien torchées, les refrains et les soli de guitares efficaces. Cette fois encore Blades et Aldrich se sont impliqués dans l’écriture. A noter que la ballade « Eyes Of A Child » est estampillé Jack Blades – Tommy Shaw (Styx). Ce morceau rappellera indéniablement de bons souvenirs aux fans de l’éphémère projet Damn Yankees. Voilà un disque plaisant et indéniablement accrocheur conçu sans véritable ambition par des musiciens de top niveau. [Ph. Saintes]

     

     

    votre commentaire
  • KXM
    La règle de trois

    KXM revient avec Circle Of Dolls, troisième album du trio Doug Pinnick (King’s X), George Lynch (Dokken, Lynch Mob) et Ray Luzier (Korn). Un melting-pot risqué mais réussi d’une formation qui n’en a que faire d’alibis quelconques. [Entretien avec Doug Pinnick (voix, basse) par Philippe Saintes – photo : Sébastien Paquet]

    KXM promo 2019

    Comment est né Circle Of Dolls ?

    Très spontanément. Nous n’avions pas planifié le style, les sujets, l’ambiance. On a laissé aller notre inspiration une fois réunis tous les trois dans la même pièce. On a enregistré très rapidement dans une excellente ambiance. Il y a eu beaucoup de fous rire. Chris Collier, un ami du groupe, a produit et mixé le disque. Est-ce le meilleur des trois ? Honnêtement, je ne sais pas. Si c’est l’avis des auditeurs et des critiques, alors j’accepte ce jugement. Pour moi, il s’agit juste d’un nouvel album de KXM dans lequel j’ai mis tout mon cœur et toute mon énergie et je suis très satisfait du résultat. Maintenant, j’espère que les auditeurs l’apprécieront autant que moi. Si nous avons l’opportunité de partir en tournée, nous le ferons avec plaisir car nous adorons tous les trois la scène.

    Circle Of Dolls est un manifeste engagé. Le titre « Border » évoque la barrière entre les Etats-Unis et le Mexique.

    Oui, c’est la guerre des mots chez nous à propos de la situation à la Frontière. On parle de réfugiés, de migrants ou de clandestins. C’est sans doute le sujet le plus clivant aux Etats-Unis. Au Royaume-Uni, le Brexit ouvre la porte à une discrimination généralisée. Ce n’est donc guère mieux.  Je ne prétends pas avoir la solution. Après tout, je ne peux aller nulle part sans mon passeport. Toutefois, je suis opposé à la tolérance zéro en matière de politique migratoire. Nous ne devons pas tourner le dos aux gens qui fuient la misère, la guerre ou l’oppression politique. Le moins que l’on puisse faire c’est d’en parler, de sensibiliser ceux qui nous écoutent.

    Dans le livre What You Make It (The Authorized Biography Of Doug Pinnick) on apprend que tu as eu l’opportunité de rejoindre Kansas et même Deep Purple mais tu as finalement préféré poursuivre l’aventure avec King’s X. Pas de regrets ?

    Aucun. Ian Gillan est mon chanteur préféré et j’adore Steve Walsh. J’ai décliné ces opportunités parce que je ne souhaitais pas reproduire ce que ces deux icônes du rock avaient créé et devenir un chanteur de substitution. Je préfère jouer ma musique sans règle, ni contrainte. Je n’étais de toute façon pas disponible car King’s X était très actif à la fin des années ‘80. Peu de groupes peuvent se targuer d’avoir continué avec le line-up d’origine, il y a ZZ Top ou U2. C’est cool de faire partie d’une formation qui a tenu aussi longtemps sans être un gros vendeur,  malgré un parcours semé d’embûches. C’est comme un mariage pour chacun de nous.

    KXM promo 2019 (2)

    King’s X sortira prochainement un nouvel album chez Golden Robot Records. On évoque un retour aux sources…

    Il n’est pas sans rappeler l’atmosphère de nos premiers albums, effectivement. J’ai enregistré avec Jerry (Gaskill, batterie et voix) et Ty (Tabor, guitare et voix) dans les mêmes conditions que Gretchen Goes To Nebraska (1989). Nous avons pris notre temps au niveau des arrangements et travaillé très dur pour ne pas décevoir les fans purs et durs. On a l’espoir d’en faire un « classique » de King’s X. Je ne vais pas m’avancer sur la date de sortie mais ce sera certainement pour 2020.  Nous sommes actuellement en pleine phase de mixage.

    Que peux-tu nous dire sur tes plans futurs ?

    Je pars en tournée cet automne avec Joe Satriani (guitare) et Kenny Aronoff (batterie) dans le cadre de l’Experience Hendrix Tour, aux Etats-Unis. Il n’y a malheureusement pas de dates programmées en Europe pour l’instant. Après, je vais commencer à travailler sur un album solo et ensuite je rejoindrai mes potes Jabo et Scot  Bihlman pour le troisième opus de Grinder Blues. C’est tout pour l’instant (rires). Une fois un album terminé, j’ai vraiment besoin de me mettre au projet suivant et travailler, j’adore ça !  

     

    KXM Circle Of Dolls cover

    KXM

    Circle Of Dolls

    Frontiers Records

    George Lynch nous revient déjà sept mois après la sortie de The End Machine, un album enregistré avec ses anciens acolytes au sein de Dokken (Jeff Pilson et Mick Brown). On retrouve cette fois l’ami George entouré du  chanteur-bassiste Doug Pinnick (Kings X) et du batteur Ray Luzier (Korn) qui sont loin d’être un backing de luxe pour guitar-hero en mal de reconnaissance planétaire. Circle of Dolls est déjà le troisième album de ce trio baptisé KXM. Descente d’intro, basse distordue, gospel rouleau compresseur et riffs à faire virevolter les étoiles : c’est « Mind Swamp ». On retrouve cette fièvre hard-rock funk dans « Big As The Sun » ou « Cold Sweats ».  « Time Flies » est un rock marathon alors que « Lightning » et « Twice » sont des petits joyaux de feeling où la guitare se fait langoureuse. Lynch nous met la gifle avec des solos souvent complexes mais  toujours variés prêts à accueillir les délire vocaux de Pinnick (« Vessel Of Destruction »).  Sur la plage finale « The Border », vous reconnaîtrez quelques belles influences (Beatles, Pink Floyd). Dans l’ensemble, le jeu reste fluide, acéré, ouvert à toute ébauche de groove, avec de bonnes trouvailles au niveau des arrangements. Une vraie réussite. [Ph. Saintes] 

    Retrouvez cet article dans Classic Obs' #4 (octobre-novembre 2019)

     

     

    votre commentaire