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     LEE AARON

     Les réseaux (a)sociaux

    S’il y a bien une chronique pour laquelle on peut se permettre des écarts d’objectivité, c’est celle du nouvel album de Lee Aaron. Puissance subtile, explosion contrôlée, équilibre absolu, sans surprise, on est fan ! Cette chronique est donc un éloge assumé à l’artiste canadienne. [Entretien avec Lee Aaron, chant, par Philippe Saintes – Photos : Theresa Mitchell]

    Lee Aaron - promo

    Je trouve qu’ Elevate offre un panorama des nombreux styles qui ont émaillé tes précédents albums.

    Ça me fait plaisir que tu me dises ça. Mes goûts musicaux sont très variés. Je reste encore aujourd’hui influencée par ce que j’écoute. Billie Eilish par exemple est une chanteuse et une productrice talentueuse. Elle a ouvert une nouvelle voie dans la musique en alliant le blues, la pop et le hip-hop. Un magazine allemand m’a récemment demandé mon top 5 des albums qui ont changé ma vie. Parmi ceux-ci, j’ai cité Physical Graffiti de Led Zeppelin pour ses ambiances et couleurs sonores. C’est un patchwork que j’adore et aussi que j’aime faire. Il y a une touche rock sudiste sur « Still Alive ». « Elevate » et « Heaven’s Were We Are » sont des morceaux de rock modernes tandis que « Rock Bottom Revolution » propose des riffs blues rock accrocheurs façon AC/DC. Cette force musicale provient surtout de la cohésion du groupe. Cela fait plusieurs années maintenant que je joue avec les mêmes musiciens.

    Tu as enregistré quatorze titres mais seulement dix figurent sur Elevate. Que comptes-tu faire des quatre morceaux écartés ?

    « What Would Jesus Drink », « Blood Money », « The Heart Wants What It Wants » et un quatrième titre dont j’ai oublié le nom, se trouvent en sécurité sur mon ordinateur.  Je ne sais pas encore où ils aboutiront. Peut-être sur une compilation ou un EP. Ce sont d’excellentes chansons mais comme nous souhaitions sortir une version vinyle de Elevate, nous ne pouvions pas y mettre plus de 45 minutes pour éviter de « serrer » les microsillons.

    Le titre éponyme Elevate est une critique sur les réseaux sociaux et leurs effets pervers. Tu sembles très sceptique par rapport à l’évolution de ces outils technologiques.

    Je pense qu’il faut effectivement s’inquiéter de la façon dont les réseaux sociaux ont pu modifier et transforment encore nos comportements, nos interactions. Je fais souvent référence au film The Truman Show avec Jim Carrey, l’histoire d’un type qui vit dans sa bulle.  Nous faisons la même chose en nous réfugiant sur Facebook, Google, Instagram,... Le problème se situe dans les algorithmes qui nous manipulent d’une certaine façon. On prend l’habitude de se connecter avec des personnes qui ont les mêmes croyances. Je pense qu’il est plus intéressant de discuter avec des personnes qui n’ont pas la même opinion afin d’avoir une vision plus large. C’est le message d’Elevate.

    « Rock Bottom Revolution » est un hymne de stade. C’est une chanson qui incarne un certain mouvement de rébellion, non ?

    C’est en quelque sorte un appel aux armes pour dire ‘stop’ à cette situation ridicule. On retrouve la même rhétorique que pour « Elevate ».  Les paroles condamnent le manque d’ouverture. C’est aussi une critique par rapport à la jeune génération à l’épiderme fragile qui censure tout ce qui l’offense. Ce n’est pas dans ma culture de penser et d’agir comme ça !

    Lee aaron promo 2

    Quelles ont été les sources d’inspiration pour les titres « Still Alive » et « Freak Show » ?

    « Still Alive » fait référence d’une manière très large à notre façon de continuer à avancer. Les pires choses nous tombent dessus mais Il faut, quelque part, accepter de vivre avec. Nous sommes des survivants. « Freak show » est l’une des quatre chansons enregistrées live durant le Covid à Vancouver. Un mini concert baptisé Rockin’ From Home.  Nous avons joué nos parties chacun à notre tour en étant filmé et cela a donné une vidéo en mode confiné qui communique à nos fans de la bonne humeur. Nous avons repris à cette occasion la chanson « Everyday People » de Sly and the Family Stone. J’ai été inspirée par les paroles de ce morceau qui parle d’égalité. Lorsque Sean m’a envoyé le riff de « Freak Show », j’ai voulu écrire une musique aussi fun. Nous sommes tous des phénomènes dans ce monde étrange. Tous les êtres sont égaux et particulièrement différents, c’est le thème de la chanson.

    Tu n'as pas pu promotionner l’album Radio On ! en 2021 à cause de la pandémie. Comptes-tu ajouter des chansons des deux derniers disques à la setlist lors de la prochaine tournée ?

    Et bien, tout dépendra de la durée du show. Dans le meilleur des cas, si je suis en tête d’affiche, je ferai un set de 90 minutes. Evidemment, j’interpréterai des chansons plus anciennes car c’est toujours intéressant de jouer la carte de la nostalgie, tu ne crois pas ? « The Metal Queen », « Whatcha Do to My Body »,… des titres que les fans veulent entendre en concert. Donc, on ne touchera pas aux classiques mais quand je fais la promotion d’un nouvel album alors effectivement je choisis au moins deux titres qui seront interprétés live. C’est amusant d’évoquer Radio On ! parce que le public a réclamé des chansons de cet album qui n’étaient pas nécessairement les singles. Ainsi, on joue « Soulbreaker , « Vampin » et « Soho Crawl». Pour Elevate, il y a plusieurs titres que le groupe aimerait interpréter lors de la tournée 2023. « Rock Bottom Revolution » en fait partie. Pour le reste rien n’est encore décidé.

    Avec le temps, ressens-tu une forme d’évolution au niveau de la tessiture de ta voix et dans ta façon de chanter ?

    Lorsque j’ai fait diversion à la fin des années en me tournant vers le jazz et le blues, je me suis vraiment fait plaisir. J’étais à la recherche des racines du rock’n’roll. Je suis devenue à ce moment une meilleure chanteuse, une meilleure compositrice et une meilleure productrice. Je n’ai pas peur aujourd’hui d’explorer de nouvelles choses avec des intonations plus bluesy. La plupart de mes chanteurs préférés, Robert Plant, Ian Gillan, David Coverdale à ses débuts ou Paul Rodgers de Bad Company, ont tous une culture blues. Ces artistes sont représentatifs de l'éclectisme musical. Je prends désormais la liberté d’interpréter de nombreuses chansons de cette manière, c’est une sorte d’émancipation vocale. Et puis, je parviens toujours à atteindre des notes hautes. Je peux d’ailleurs chanter de façon agressive comme sur Diamond Baby Blues. J’ai appris avec le temps qu’il n’était pas nécessaire de chanter de façon extrême tout le temps pour obtenir une bonne dynamique et d’être efficace. Donc, oui on peut dire que j’ai actuellement un registre vocal plus étendu.

    N’envisages-tu pas d’enregistrer un nouvel album de jazz dans le futur ?

    Il ne faut jamais dire jamais. C’est l’une de mes expressions favorites. Après avoir élevé mes enfants et mon come-back musical en 2016, j’ai pris énormément de plaisir à enregistrer à nouveau des chansons rock. Je suis très inspirée en ce moment. Mais qui sait ? Peut-être lorsque j’aurai 70 ans, je me dirai qu’il est temps de sortir un autre album de jazz. En fait, je n’aime pas m’imposer des limites. Je le ferai certainement mais quand je jugerai le moment opportun. Je viens de voir Bruce Springsteen parler de son album de reprises soul dans l’émission télé de Jimmy Fallon. Je trouve que c’est une bonne idée car sa démarche a le mérite de donner envie d'écouter les originaux!

    Lee Aaron band 2023

    Un fan a récemment créé une figurine Pop unique à l’effigie de la Metal Queen, ton alter ego. Quel est ton sentiment ?

    En fait, j’ai moi-même découvert ce modèle sur internet. La Metal Queen a même eu droit à une figurine en Lego. En réalité, j’ai une relation amour-haine avec tout cela. Je trouve génial d’être une référence pour une génération après 40 ans de carrière. Des fans ou des critiques voudraient m’entendre chanter du hard rock 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Je peux le faire bien sûr mais en tant qu’artiste j’ai beaucoup plus à monter dans ma vie et sur le plan professionnel. Pour certaines personnes, je resterai éternellement la pin-up fantasy de débuts et cela me chagrine. Le journaliste du magazine Classic Rock qui a fait la chronique du nouvel album le trouve trop pop.  Suis-je censée faire toujours la même chose ? Non bien sûr ! Je suis mon propre patron. J’aime découvrir de nouveaux horizons, écrire, produire et enregistrer de nouvelles chansons. Je veux tout simplement continuer à faire ma musique. Bien entendu, je ne peux pas satisfaire tout le monde.

    Y a-t-il des artistes avec lesquels tu aimerais collaborer dans le futur ?

    Jack White ! C’est l’un de mes guitaristes actuels préférés. Il est absolument incroyable.

    Es-tu toujours en contact avec John Albini, ton ancien guitariste et co-auteur ?

    Oui. Il vit à Nashville. Il travaille dans la production et il possède son propre studio appelé Sonic Eden. Nous sommes toujours amis. Il est formidable. Je l’adore !

    « Je suis devenue une meilleure chanteuse, une meilleure compositrice et une meilleure productrice. Je n’ai pas peur aujourd’hui d’explorer de nouvelles choses avec des intonations plus bluesy. »

    Quels sont tes prochains projets. Travailles-tu toujours sur tes mémoires ?

    Oui, oui. J’ai écrit un passage justement la nuit dernière. Depuis que je me suis lancée dans cette autobiographie, j’ai sorti deux albums studios et plus récemment, j’ai déménagé. Cela a interrompu le processus. J’ai repris l’écriture mais je ne me mets pas trop de pression pour ce défi. Cela sortira bien assez tôt. Je veux surtout écrire un livre qui ait du sens. Ce sera un ouvrage complet sur mes expériences.  

    Sean Kelly, le guitariste de ton groupe a écrit un bouquin sur le scène rock au Canada durant les années ’80, Metal on Ice : Tales from Canada's Hard Rock and Heavy Metal Heroes. Quels sont justement tes cinq artistes canadiens favoris ?

    Oh, boy ! Rush est le premier nom sur ma liste. C’est un groupe sous-estimé en terme de récompenses mais aucune formation ne sonne comme Rush. C’est à mon avis, le plus grand groupe de rock canadien. J’aime bien la musique de Max Webster. J’étais une fan lorsque j’étais adolescente. Et puis, il y a les Guess Who de Burton Cummings. Les premiers albums sont uniques. Du côté féminin, je pense avant tout à Alanis Morissette. Je crois avoir quelque peu pavé la route pour elle dans les années ’80.  Son premier grand succès international Jagged Little Pill a changé beaucoup de choses pour les filles qui se sont lancées dans la musique. Alanis a été une grande source d'influence dans les nineties grâce à un style innovant.  Je n’oublierai évidemment pas Joni Mitchell qui est une véritable icône. Elle a été une pionnière en tant qu’auteure-compositrice-interprète. Personne ne peut se comparer à Joni Mitchell.

    Une question plus difficile. Quels sont les 5 titres de ton répertoire que tu préfères ? 

    Honnêtement, je ne citerai pas mes tubes car je m’en lasse vu que je les joue tout le temps. La ballade « Private Billie Holiday » de l’album Beautiful Things, est probablement la meilleure chanson que j’ai écrite.  J’ai aussi un faible pour « Twenty One » que l’on trouve sur Radio On ! mais également « Heart Fix » de Fire and Gasoline. Hmm ! Probablement « Emotional Rain » de l’album éponyme. Et la dernière,… Mon Dieu c’est dur !  « Diamond Baby Blues » je pense.  Quand on joue cette chanson en concert, il y a toujours une réaction positive du public. Même ceux qui ne la connaissent pas tapent des pieds et des mains. « Diamond Baby Blues » procure une émotion qui me fascine.

    Lee aaron promo 3

    Tes enfants ont-ils apprécié le dernier album ? 

    Jimmy Fallon a posé la même question au Boss hier. Je pense que mon fils et ma fille sont arrivés à un âge où ils commencent à réaliser ce que le travail de maman et papa est plutôt cool. L’été dernier, ils nous ont accompagnés lors de grands festivals au Canada. Ils ont été surpris de voir tous ces gens de la sécurité autour de nous. Ils se sont dit « Woohh ! Nos parents ont une certaine renommée au pays. » Ils commencent à comprendre notre activité.  Mais il y a encore un an ou deux, ils ne s’intéressaient pas à notre musique. C’était plutôt « fait moi un sandwich au beurre de cacahuètes m‘man ! » J’étais la mère sandwich (rires).

    A-t-on une chance de te voir en 2023 en Europe ?

    Cela devient de plus en plus compliqué pour les groupes nord-américains de se produire en Europe à cause des coûts du carburant et aussi les hôtels qui deviennent hors de prix. Nous pouvons juste espérer pouvoir participer à des festivals décents. Je croise les doigts. On travaille actuellement avec notre agent afin de traverser l’Atlantique. J’adore la France et je garde un excellent souvenir de notre concert à Vouziers, à l’occasion d’un petit festival. Le public et les organisateurs étaient très sympathiques. J’aimerais sincèrement revenir jouer chez vous cette année !

     Lee Aaron - Elevate cover

     LEE AARON - ELEVATE

     Hard Rock

     Metalville

    Elevate est marqué du sceau de l'exigence. L'ambiance est tantôt rythmée (« Trouble Maker ») tantôt torride (« Highway Rome »). Le refrain de la plage d’ouverture « Rock Bottom Revolution » nous rappelle les chansons vintage des premiers albums de la Metal Queen. Rien n'est fait au hasard et les mélodies sont définitivement riches et prenantes, comme sur le très bon « Freak Show » ou la ballade dansante « Red Dress » interprétée avec l’aide de la violonise Karen Barg (Transiberian Orchestra). Elevate se veut souple et inattendu. Lee s’amuse, s’essaie dans de nouveaux territoires musicaux sans pour autant perdre son identité artistique. Elle sait ce qu'elle veut, et sa musique ne baigne jamais dans une mièvre facilité. Même l’électrisant « Spitfire Woman », l’histoire vraie d’un maricide, ne met pas en défaut le travail mélodique du disque. Décidément il se passe toujours quelque chose avec Lee Aaron depuis son retour sur la scène rock. La chanteuse et son groupe surprennent mais ne déçoivent jamais. Dès lors, il serait dommage que vous ne fassiez pas l'effort de vous laisser embarquer par le rock absolument lumineux de Elevate.


     

     

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    HEROES & MONSTERS

    Le trio de l’étrange

    Formation improbable que celle réunissant le guitariste Stef Burns (Y & T, Alice Cooper, Huey Lewis & The News), le bassiste/chanteur Todd Kerns (Slash ft. Myles Kennedy & The Conspirators) et le batteur Will Hunt (Evanescence) et pourtant un réel projet musical est né grâce à la réalisation d’un album imparable. [Entretien avec Todd Kerns, chant/basse par Philippe Saintes – Photos : Enzo Mazzeo]

    HEROES & MONSTERS : Promo

    Heroes & Monsters est un jeune projet. Comment est-il et avec quelle volonté ?

    Le groupe est né à l’initiative de Stef et Will. Ils cherchaient un chanteur et un bassiste. Finalement, j’ai été sollicité pour l’enregistrement de l’album. Visiblement, ils aimaient bien mon style (rires). Will est un ami. En revanche, je ne connaissais Stef que de réputation. C’était avant tout un retour dans le jeu pour tous les trois après deux années de covid. La situation a nourri le processus. Nous avons travaillé selon la norme actuelle, à savoir des enregistrements à distance. De toute évidence, il ne nous était pas possible de recréer l'alchimie d'une session d'enregistrement traditionnelle. La suite reste encore à écrire.  Tout est possible en fait et c’est ça qui est excitant dans ce métier. Nous sommes satisfaits de ce premier disque, deux clips l’accompagnent et un troisième sera mis en boîte lors de la dizaine de concerts programmés en Italie au mois de février. Si la scène est importante pour nous, les albums le sont tout autant. Même si le format physique perd un peu de son sens aujourd'hui avec la consommation de la musique en streaming et les difficultés de l’industrie musicale, je suis heureux d'avoir encore au fond de moi cette envie de créer.

    Vos chansons vont droit au but sans artifice. On ressent évidemment le mélange de vos influences.

    C’est naturellement la musique que nous aimons collectivement qui a inspiré le travail de composition mais chacun a ajouté ses idées propres. Je suis d’ailleurs content que cela soit ressenti par une oreille extérieure. Le courant essentiel dans notre musique est un rock’n’roll agressif avec un gros son de guitare. Will, Stef et moi sommes attirés par les chansons accrocheuses, bien ficelées. Nous apprécions aussi bien les compositions d’Abba que de Black Sabbath en terme de mélodie. Cela se ressent dans l’album.

    Il y a également des réminiscences des années ’80, on pense notamment à des titres comme « Let’s Ride It » et « Locked And Loaded ».

    C’est une remarque intéressante. Les années ’80 sont régulièrement décriées par des professionnels de la musique. Les groupes qui ont survécu à cette période savent de quoi je parle. Personnellement je me fous des critiques et des gens qui portent aujourd'hui un regard excessivement négatif sur la production de cette époque. Si sur les dix titres de l’album certains ont une sonorité 80s, tant mieux. On trouve des morceaux heavy, sombres, calmes ou entraînants sur Heroes And Monsters. J’aime les variations de genre car cela renforce la dynamique.

    HEROES & MONSTERS : Todd Kerns

     

    « Slash est l’une des personnes les plus sympathiques que je connaisse. C’est très facile de travailler avec lui. »

    Tu as accompagné le Bruce Kulick Band lors des dernières Kiss Kruise et plus récemment sur deux concerts donnés à Las Vegas à l’occasion du nouvel an. Quels titres de la période 1984 à 1996 de Kiss apprécies-tu particulièrement ?

    « Turn On The Night » qui est un morceau sous-estimé selon moi. J’adore « Crazy Crazy Nights » qui suscite toujours un engouement incroyable de la part des fans. J’adore les paroles du pré-refrain « You are my people, you are my crowd, this is our music » et voir ensuite le public chanter en chœur « we love it loud », le poing levé.  C’est vraiment impressionnant. J’ajouterai « Who Wants To Be Lonely » et « Tears Are Falling ». J’aime également jouer « Unholy » un titre qui a permis à Kiss de se remettre en selle au début des années ‘90. On a aussi ajouté dans la setlist « Exciter » la plage d’ouverture de Lick It Up et « The Oath » du très décrié The Elder. Ce sont les choix de Bruce mais je trouve cela fun d’interpréter des chansons moins connues du répertoire de Kiss.

    HEROES & MONSTERS : l'interview de Todd Kerns

    Tout le monde connaît Slash le guitar hero, la légende des Guns N’Roses. En tant que son complice au sein des Conspirators, comment pourrais-tu le décrire sur le plan humain ?

    Slash est l’une des personnes les plus sympathiques que je connaisse. Il ne heurte personne, ne se met jamais en colère. C’est très facile de travailler avec lui. C’est aussi un passionné qui est exigeant avec lui-même.  Il aime par exemple répéter longuement avant de partir en tournée parce qu’il veut donner le meilleur sur scène. Ce n’est pas quelqu’un qui se repose sur ses lauriers. Il est probablement arrivé au sommet de son art aujourd’hui à force de travail et de perfectionnement. On s’appelle régulièrement et je le considère comme un véritable ami. J’ai la chance de jouer depuis près de treize ans maintenant avec l’un des plus grands guitaristes de l’histoire du rock et cette collaboration va continuer.

       HEROES & MONSTERS : cover

     

    HEROES & MONSTERS - HEROES AND MONSTERS

     Hard Rock

    Frontiers Records

    Todd Kerns ne nous pas mené en bateau. Ce premier enregistrement du trio ravira aussi bien les adeptes d’Evanescence, de Y & T ou des Guns. Gare aux ouïes, ça sent le brûlot grâce aux riffs d’acier, une rythmique marteau-piqueur et des refrains entraînants. On écoute d’ailleurs avec plaisir les fleurons « Raw Power », « Let’s Ride It », « Locked And Loaded », « And You’ll Remain » (avec des éléments empruntés à Led Zep) ainsi que « Set Me Free », l’excellente reprise de Sweet. Alchimistes, esthètes, Todd Kerns, Stef Burns et Will Hunt allient efficacement l’énergie pulsive de l’interprétation à un sens inné de la mélodie béton. Tous les morceaux de cet album possèdent un côté accrocheur et une habileté qui suffisent à justifier l’existence d’une telle entreprise. [Philippe Saintes]

    Retrouvez cet article dans Metal Obs' Janvier-Avril 2023

     

     

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    BLACK SABBATH 

    HEAVEN AND HELL (Deluxe Edition)

     et MOB RULES (Deluxe Edition)

     BMG

    Heaven & Hell - cover

     

    Réédition pour les albums de Black Sabbath enregistrés avec Ronnie James Dio au début des années ’80. Il s’agit incontestablement de deux des meilleures galettes de la discographie du groupe. Grâce à la production sans faille de Martin Birch (Deep Purple, Rainbow), Heaven And Hell et Mob Rules marquaient le retour au premier plan d’une formation britannique qui restait sur deux échecs commerciaux. Sorti en 1980, Heaven And Hell est apparu sous un jour plus varié avec notamment l’utilisation des claviers mais la rage est toujours présente avec à des morceaux puissants et lourds. Remis en lumière, « Neon Knights », « Children Of The Sea », « Wishing Well » ou « Die Young » sont des joyaux intemporels du hard rock. Pourtant, c’est bien le titre éponyme « Heaven And Hell » qui reste l’hymne profession de foi grâce à son refrain fédérateur. La nouvelle version remasterisée ne propose rien d’essentiel par rapport aux précédentes éditions mais on ne se lasse pas de réécouter les classiques ou les titres live captés lors de la tournée ’81 qui verra Dio introduire le symbole des fameuses cornes du diable (Geezer Butler en a toutefois revendiqué la paternité).

     

    Mob Rules - Cover

     

    Sur Mob Rules, le Yankee Vinny Appice (Rick Derringer), remplace le batteur historique Bill Ward. Cet opus regorge de coups de boutoir (« The Mob Rules », « Slipping Away ») et d’envolées lyriques (« Falling Off The Edge Of The World », « The Sign Of The Southern Cross »). Un vrai régal ! Comparativement à la version d’origine, le son des guitares et de la basse est plus dense et plus chaud. Les harmoniques et des détails instrumentaux ressortent. Même qualité dans la comparaison avec les pressages vinyles. Du côté des bonus, on est agréablement surpris d’entendre un concert enregistré lors d’une escale du Sabbat Noir au Portland Memorial Coliseum, en 1982, ainsi qu’un remix cadeau de « Mob Rules ». Voilà deux disques cultissimes à écouter sans modération pour découvrir ou redécouvrir l'héritage de Black Sabbath avec le regretté mais toujours unique Ronnie James Dio. [Philippe Saintes]

      

     

     

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  •  KISS

    CREATURES OF THE NIGHT - ÉDITION 4Oè ANNIVERSAIRE

    Universal France

    Après le diptyque disco Dynasty-Unmasked, Kiss a enregistré son Sgt. Pepper, un album art-rock baptisé (Music from) The Elder. C’est pourtant un échec commercial et la critique ne se prive pas pour enterrer le groupe. Un an plus tard (1982), le trio Stanley-Simmons-Carr et le producteur Michael James Jackson se surpassent pour livrer un disque de heavy metal supersonique. Le résultat : Creatures Of The Night, 10è album studio et pièce centrale dans la discographie de la formation US.

      Kiss - COTN 40th Anniversary

    40 ans après sa sortie, Creatures Of The Night vient d’être réédité dans un luxueux écrin. Le coffret Super Deluxe contient la version originale de l’album, deux disques remplis d’extraits de sessions  (24 démos inédites), des enregistrements live de la tournée US, des bruitages utilisés lors de cette tournée (sirène, roulement d’un char, sons gores,…), un livre de 80 pages particulièrement instructif quant au processus créatif des New Yorkais avec de nombreuses interviews, la memorabilia d’usage (reproduction du Tour Book de tournée 10th Anniversary ainsi que du billet du fameux concert au stade Maracana le 18 juin 1983,  des photos de presse, des autocollants et posters, des médiators et des pins). On trouve également une toute nouvelle version de l’album mixée en Dolby Atmos 5.1 pour lecteur Blu-ray.  Une arme magique qui donne à la réédition une âme moderne. Il en résulte une redécouverte de ce disque qui a ravi les oreilles des rockers à une époque où l’industrie musicale ne jurait que par la new wave. Rien n’a été ajouté ou retiré, juste remixé avec les techniques d’aujourd’hui. Le bluesy « I Still Love You », l’apocalyptique « War Machine », le trépident « Rock’n’Roll Hell » et l’incontournable « I Love It Loud », n’ont jamais aussi bien sonné.   

    Paul Stanley et Gene Simmons étaient déterminés à ne pas laisser couler le navire. « L’échec de The Elder a eu sur nous le même effet qu’un uppercut de Mike Tyson. Nous étions devenus riches, empâtés et paresseux. Il était temps se battre pour ramener le groupe sur de bons rails en réaffirmant notre identité musicale » avoua Paul Stanley. 

    Kiss fit appel à Michael James Jackson come producteur et les deux Dave, Wittmann et Thoerner comme ingénieurs pour produire dans un premier temps quatre démos au Record Plant de Los Angeles. Le coffret propose des versions alternatives de « I’m A Legend Tonight », « Down On Your Knees », « Nowhere To Run » et « Partners In Crime » quatre titres qui devaient à l’origine figurer sur un EP baptisé Severe Cuts. Au final, le label Phonogram sortira une anthologie opportuniste (Killers).  La première mouture de « Nowhere To Run » a été immortalisée dans le studio d’Ace Frehley avec un titre apporté par Paul Stanley (« Deadly Weapon »), indéniablement une des pépites de l’album, et un autre par Gene Simmons (« Feel Like Heaven ») avec une touche plus soul. Il s’agit en réalité des premières sessions du groupe avec le batteur Eric Carr.

      Kiss - COTN 40th Anniversary (2)

    Afin de pallier à l’absence du démissionnaire Ace Frehley, Kiss avait invité plusieurs guests pendant l’enregistrement des nouvelles chansons. Andy Ferris (futur Mr. Mister) a notamment effectué le solo du titre éponyme tandis que « Danger » est à mettre au crédit de Bob Kulick. Une fois les parties vocales complétées, Michael James Jackson fit venir le guitariste de blues et de jazz, Robben Ford pour apporter une atmosphère particulière à deux chansons : « Ce fut certainement une collaboration improbable mais j’ai pris énormément de plaisir lors des neuf jours passés en studio avec le groupe. J’ai fini par jouer sur « Rock And Roll Hell » et une ballade rock appelée « I Still Love You ». C’était étrange car je n’avais pas l’habitude de jouer ni d’écouter ce style de musique. Ils me mirent rapidement mis à l’aise, me disant combien ils avaient aimé mon travail. »

    À ce moment, Vincent Cusano, très vite rebaptisé Vinnie Vincent, n’était rien de plus qu’un compositeur occasionnel et l’un des nombreux guitaristes ayant participé aux sessions d’enregistrement (il a joué sur cinq chansons). ). Parmi la vague de musiciens invités pour donner à Creatures Of The Night son atmosphère figure le bassiste Jimmy Haslip qui avait fait des vagues au sein des Yellowjackets (avec Robben Ford), son collègue de Toto Mike Porcaro sans oublier le guitariste rythmique et compositeur Mitch Mitchell.

    « Cette équipe a construit quelque chose de très fort qui reste encore aujourd’hui apprécié des fans. »

    Plus que la texture variée des guitares, la lourdeur des riffs et la fureur électrique, le succès de Creatures Of The Night repose sur le son de batterie d’Eric Carr tonitruant comme le galop de la horde sauvage. « Eric a été le poumon de l’album, une force vitale », nous a confié la producteur Michael James Jackson en 2018. Le style d’Eric était sec et explosif. Cette frappe enclumeuse est d’ailleurs présente sur les nombreuses démos de ce coffre à trésor.

    C’est évidemment dans la jungle des bonus que les aficionados prendront plaisir à se perdre. Les die-hards de la Kiss  Army apprécieront ainsi une ébauche de « Don’t Leave Me Lonely » (une idée de Carr) qui fut transformée en titre abouti par Bryan Adams sur l’album Cuts Like A Knife.

    Kiss - COTN 40th Anniversary (3)

    Parmi le matériel inédit citons l’excellent « Not For The Innocent ». Cette démo sur laquelle Paul Stanley et Gene Simmons se partagent le chant est bien meilleure que le version définitive figurant sur Lick It Up (1983). On peut désormais entendre avec un son très correct les versions initiales de l’hymnesque « It’s My Life » et de la ballade « Legends Never Die » que Simmons placera sur l’album WOW (1984) de Wendy O. Williams. Ces deux enregistrements datant des sessions de 1982 ont été piratées depuis des lustres. L’énergie avec laquelle les Kiss attaquent les prises de travail se résume en trois mots : cohésion, concentration et collaboration. Les familiers seront surpris de découvrir les instrumentaux « Tell It To A Fool » et « Chrome Goes Into Motion » jamais gravés ainsi que deux curiosités chantées par Simmons : « Something Seems To Happen » et « It’s Gonna Be Alright ». La voix de Stanley s’impose sur « Betrayed », une esquisse co-signée avec Vinnie Vincent témoignant du bon goût de la sélection proposée. Sachez que Creatures Of The Night est disponible en CD double et en vinyle pour les fans n’ayant pas les moyens de s’offrir l’onéreux coffret Super Deluxe.

    COTN était de loin l’album le plus dur et le plus enragé grâce à une musique forte et des breaks savamment exécutés. Kiss pouvait désormais concurrencer la nouvelle génération heavy metal (Iron Maiden, Judas Priest,…) à l’aube des années de plomb. Même si commercialement, il n’a pas atteint les sommets, il marquait le début d’une nouvelle ère, raison pour laquelle quarante ans après sa sortie il n'a pas vieilli à l’image de sa mythique pochette « bleu cobalt » réalisée en collaboration avec le photographe français Bernard Vidal.

    Kiss - COTN 40th Anniversary (4)

    La tournée américaine est immortalisée dans ce 2.0 par des enregistrements de quatre des cinquante-deux concerts donnés outre-Atlantique. Les salles étaient à moitié vides mais Kiss continuait de proposer un spectacle théâtral de grande qualité. Le groupe jouait sur la tourelle tournoyante d’un char d’assaut, au milieu d’une mosaïque d’effets pyrotechniques et une avalanche de watts. Chaque riff, chaque coup de baguette est une jouissance. On ne saurait jamais assez souligner l'apport essentiel de Vinnie Vincent, qui avait officiellement remplacé Ace Frehley après la tournée promo en Europe.  « C’est Paul qui a dessiné son maquillage avec le symbole de l’Ankh et son personnage du Magicien », écrivait Gene dans son autobiographie. En 1996, le guitariste nous avait accordé une interview au cours de laquelle il était revenu avec fierté sur son passage au sein des quatre fantastiques : « J’ai accompagné Kiss en studio en 1982 puis l’année suivante pour la réalisation de Lick It up. J’ai aussi effectué deux tournées mondiales et collaboré à l’album Revenge en 1992. Kiss était un grand groupe de rock puissant et viscéral. Je suis satisfait de ce que nous avons fait ensemble. Gene, Paul, Eric et moi avions le même instinct, les mêmes goûts. Cette équipe a construit quelque chose de très fort qui reste encore aujourd’hui apprécié des fans. »

    Un autre Vincent mérite d’être cité ici. Vincent Rapez ancien collaborateur à Metal Obs’, décédé en octobre dernier après un long combat contre le cancer. Il nous revient à la pensée son humour et ses qualités humaines. Notre Vinnie, grand fan de Kiss, a rejoint Eric Carr et Michael James Jackson deux des artisans de Creatures Of The Night. Cette chronique leur est dédiée. [Philippe Saintes]

     
     

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  • RAISMES FEST 

       Live report @Raismes (Fr) le 11 septembre 2022

    Les Quireboys et Myrath ont clôturé en beauté  le festival 2022. [Live report : texte et photos par Philippe Saintes] 

    The Quireboys (UK)

    Malgré le départ de Spike (qui s’est acoquiné avec deux autres ex-Quireboys), les Britanniques ont offert une dose de rock’n’roll avec de bonnes vibrations dimanche. Guy Griffin qui assure désormais le chant, nous a confirmé backstage, la sortie en décembre d’un nouvel opus avec la participation de vieux camarades (Joe Elliott, Dan Reed, Scotti Hill, Chip Z’Nuff, Ryan Roxie, …). 

     The Quireboys - Raismes (1)

     Quireboys - Raismes 2022

    Quireboys - live Raismes (2)

     Myrath (TUN)

    Voilà un combo qui pourrait atteindre les hautes sphères de la gloire. Jongleur, danseuse du ventre, cracheur de feu, les Tunisiens ont bouclé le festival avec leur metal oriental sophistiqué devant une assistance satisfaite. Apothéose d’une édition sans faille !

    Myrath - Raismes 2022

    Myrath - Raismes 2022 (2)

     Myrath - Raismes 2022 (3)

     

     

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  • RAISMES FEST 

      Live report @Raismes (Fr) le 10 septembre 2022

    Retour sur les moments forts du premier jour du festival raismois organisé dans le parc du château. [Live report : texte et photos par Philippe Saintes]

    Little Caesar (USA) 

     Un show bien huilé, classique mais efficace des vieux briscards de Little Caesar, qui sous leurs airs de ‘papis’ en remontent encore à plus d’un groupe de blancs-becs. 

    Little Caesar - Raismes

    Little Caesar - Raismes (2)

    Little Caesar live Raismes

     

    Sortilège (Fr) 

    De retour aux affaires, Sortilège s’est forgé une nouvelle puissance de feu diablement efficace. Christian Augustin (chant) et sa bande ont été la bonne surprise de cette 22ème édition du festival nordiste.

      Sortilège - Raismes

    Sortilège - Raismes (2)

     

    Sortilège - Raismes (3)

    The Darkness (UK) 

    Emmené par le charismatique Justin Hawkins véritable bateleur de foire au micro et à la guitare, les sujets de feu sa Majesté Elisabeth ont passé en revue leurs cantiques dont on serait bien inspiré de retenir la quintessence. Un concert fou, fou, fou, magnifique d’efficacité et d’énergie !

    The Darkness - Raismes

    The Darkness - Raismes (2)

    The Darkness - Raismes (3)

    The Darkness - Raismes (4)

     

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  • JOURNEY : logo

     

    Il y a eu beaucoup de va-et-vient depuis le précédent album Eclipse en 2011. Steve Smith et Ross Valory ont été remerciés pour une sale affaire concernant les droits exclusifs du nom « Journey ». Personne dans le groupe n’est d’ailleurs sorti grandi du procès qui a suivi. Neal Schon (guitare) et Jonathan Cain (claviériste), les deux derniers rescapés de la période de la formation de San Francisco, ont fait appel à Randy Jackson (basse) et Narada Michael Walden (batterie et co-auteur de douze plages sur les quinze proposées ici) afin de remplacer les exclus. Notez encore que Deen Castronovo, un moment jugé infréquentable, effectue un brillant retour vocal sur « After Glow », un morceau style jazz-rock-fusion que n’aurait pas renié Toto. Des titres comme « Don’t Give Up On Us » et « You Got The Best Of Me » raviront les amateurs d’A.O.R. alors que « Still Believe In Love », une ballade bien bluesy, aurait certainement fait un carton dans les charts… il y a 40 ans ! L’album s’accélère ensuite avec « The Way You Used To Be » ou encore le groovy « Come Away With Me » mais le moment le plus hargneux s’appelle « Let It Rain » grâce à son tempo heavy. Du punch également pour Holdin’ On » chanson sur laquelle Arnel Pineda fait preuve d’une énergie débordante. Le chanteur Philippin est à l’aise dans tous les registres : du funk (« All Day And Night »), aux morceaux 100% A.O.R. (« Don’t Go », « United We Stand ») en passant par un rock de stade (« Together We Run » et son clin d’œil aux Damn Yankees ») ou le slow « Live To Love Again ». On sent que la composition des morceaux a été travaillée, que la copie a été lue et relue. Freedom, quinzième disque studio de Journey, est une totale réussite.  [Philippe Saintes] 

     JOURNEY : Freedom cover

     

     

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  •   Fortune - Logo

     

    Amateurs de hard mélodique précipitez-vous sur ce quatrième album des frères Richard (guitare) et Mick (batterie) Fortune, c’est de la  bombe ! Ces vétérans, auteurs de quelques tubes mineurs durant la vague 80s, nous dévoilent une hargne et une force que l’on ne soupçonnait pas jusqu’ici. Faites table rase de vos souvenirs mitigés et de vos préjugés hâtifs, Fortune a en effet décidé de faire du bruit et de se ruer à l’assaut. La recette AOR sans concession du quintet laisse exploser tout le meilleur de cette musique que l’on aime, grâce à une interprétation authentique avec des riffs qui s’avèrent foudroyant à chaque instant, un chant puissant et accrocheur de Larry ‘Top Gun’ Greene, des soli fort à propos qui n’en font jamais trop mais qui disent tout, une rythmique qui vous fait taper du pied encore et encore, sans oublier une production irréprochable. Des morceaux comme « Silence Of Heart », « I Will Hold You Up » (avec la participation aux claviers de Steve ‘Toto’ Porcaro), « I Should Have Known You'd Be Trouble » ou « Lunacy Of Love » laissent sur les tympans, des traces indélébiles marquées au fer rouge. L’auditeur ne tarde pas à opiner du chef devant ce revirement salutaire. On dit que la fortune sourit aux audacieux, ce Level Ground a été façonné par un groupe qui porte finalement bien son nom. [Philippe Saintes] 

    Fortune - Level Ground 

     

     

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  •  PAUL STANLEY – BACKSTAGE PASS

     Editions Talent      

     

    Paul Stanley - Backstage Pass

    Après le Confess de Rob Halford et À quoi sert ce bouton ? de Bruce Dickinson, Talent éditions a publié la version française du second ouvrage signé Paul Stanley, de la formation hard-rock au succès planétaire Kiss. 

    Faisant suite à Face The Music (2014), Backstage Pass n’est pas à proprement parler une autobiographie traditionnelle. Le charismatique chanteur-guitariste livre plutôt le fond de sa pensée, sa résilience après une réconciliation avec son paternel William (récemment décédé). Stanley détaille au fil des pages sa façon d’appréhender le succès et de bien vivre sa vie. De la maison familiale à New York au sommet de la scène rock, il nous livre ses combats de manière philosophique. On mesure ainsi le chemin parcouru au cours des cinq dernières décennies. L’artiste ne se veut pas moralisateur. Il ne donne pas de leçons au lecteur pour devenir une rock star ou pour réussir dans la vie mais livre néanmoins un conseil pour prendre son destin en main : « Ce n’est pas toujours facile, mais nous devons avoir ce petit plus de détermination, ce petit pas supplémentaire que d’autres ne feront pas, pour parvenir là où nous le voulons. »  

    Le livre est profond et les thèmes évoqués délicats. Le frontman de Kiss parle sans tabou de la famille, la religion, la différence, la vieillesse, la mort : « Nous jouons tous à Beat The Clock et nous perdons. Le temps gagne toujours. »  

    Il déroule également les domaines de son éclatant succès : la gestion de carrière, ses réussites d’artiste en général dans le monde du rock, sa forme olympique, sans oublier son amour pour la peinture (une sorte de purge pour évacuer un maximum de douleurs et de tourments), mais aussi d’autres centres d’intérêt comme le théâtre voire même la cuisine. Le passé est exploré mais l’auteur n’est pas pour autant nostalgique : « Je pense que le vivier de talents a considérablement augmenté de niveau. Ce que nous avons vu dans les émissions Ted Mack and the Original Amateur Hour – qui passaient à la télé quand j’étais enfant – était juste horrible comparé avec le niveau de The Voice. »  

    Qu’on ne s’attende pas à des révélations fracassantes après Face The Music, Stanley n’en avait sans doute aucune en réserve. Il revient tout de même sur quelques galères comme la tournée Creatures Of The Night (Kiss a joué dans des salles à moitié vide aux USA en 1982) ou son embarras par rapport à l’album Carnival Of Souls : The Final Sessions, un enregistrement sombre qui a marqué la fin de l’ère Stanley-Simmons-Kulick-Singer et ouvert un nouveau chapitre, celui de la reformation du line-up originel avec Peter Criss et Ace Frehley en 1996. « Mon problème avec ce disque est que je n’avais jamais voulu écrire des chansons qui reflètent l’insatisfaction et la détresse, ou bien qui porte un regard trop négatif dur le monde. Porter le masque de la misère me paraît fallacieux – parce que je crois qu’il faut se battre, parce que j’ai un optimisme fondamental. » Le chanteur-guitariste grimé explique dans le même registre les conséquences des expérimentations musicales à l’aube des années 1980 et l’échec de l’opéra-rock The Elder, un album molesté à sa sortie : « une tentative désespérée de recherche de validation de la part de gens qui de toute façon ne valideraient jamais Kiss. »  

    Le livre remet aussi les choses en balance. Les apports respectifs des membres de Kiss y sont décortiqués : « Avec le maquillage, Gene (Simmons) est le visage de Kiss, j’ai toujours été par essence la voix » (entendez le maître créatif) en rappelant que le groupe a évolué au travers des crises et des changements de personnel. Si ses rapports avec Ace Frehley (guitare soliste) sont devenus moins complexes ces dernières années – la cible de ses flèches est le batteur Peter Criss, dépeint comme une personne négative et frustrée. Et, bien entendu, Paul explique habilement le secret de son groupe : « Une partie de ce qui fait l’immortalité de Kiss est due au fait que nous ne changeons pas. Nous entretenons l’illusion. Je ne suis pas éternel, mais je suis heureux. » 

    On lira donc, au fil de ces quelque 250 pages traduites par Olivier Bougard, beaucoup d’anecdotes, parfois inattendues, racontées par un homme qui avait rêvé très tôt de devenir une rock star universelle et qui a su transformer ce rêve en réalité, et l‘entretenir. Un must pour les fans comme pour les amateurs plus distants. [Philippe Saintes]

     

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