• INTERVIEW DAVID COVERDALE (WHITESNAKE)

    WHITESNAKE

    Purple Rain

    La voix au bout du fil est affable et chaleureuse. David Coverdale déroule ses histoires de jeunesses, dévide  ses bobines. Il ne se raconte pas, il décrit ses anciens et nouveaux comparses et évoque la possibilité de retravailler avec Ritchie Blackmore, 40 ans après avoir reçu sa chance au sein de Deep Purple. Pour boucler la boucle ?  Entretien avec David Coverdale (chant) par Philippe Saintes  - Photo Ash Newell]

    Whitesnake 2014

    David, beaucoup d’eau a coulé sous « la fumée » depuis ton aventure au sein de Deep Purple. Pourquoi ce retour dans le passé ?

    J'ai le recul nécessaire pour affirmer que cette période a été la meilleure de toute ma vie! Chanteur inconnu âgé de 21 ans à peine, j’ai eu la chance de rejoindre l’un des groupes les plus populaires d’Angleterre. Je n’avais aucune idée de ce qu’était une carrière professionnelle. dans la musique Jon Lord et Ritchie Blakmore m’ont immédiatement pris sous leur aile. J’ai appris tant de choses, des idées que j’utilise encore aujourd’hui. Jon était une personne très humble avec un sens de l’hospitalité et un génie créatif. Mon idole a toujours été Jimi Hendrix. Lorsque je me suis assis pour la première fois en studio en face d’un autre guitariste qui pouvait jouer comme lui, avec la même facilité, j’ai été complètement soufflé. Ritchie était le « Hendrix blanc ».Je me retrouvais du jour au lendemain, aux côtés de ces monstres de la musique, à me déplacer avec eux dans des voitures de luxe et à répéter au fameux Clearwell Castle. Imaginez le choc ! J’étais très anxieux au moment de débuter l’enregistrement de Burn, à Montreux. Réuni un soir avec Jon, nous avons joué des titres de Ray Charles, du blues, des chansons des Beatles. Il m’a alors avoué qu’il avait connu des périodes où il était incapable d’écrire mais que Ritchie en revanche trouvait des idées originales dès qu’il branchait sa guitare. Nous avons beaucoup ri ce soir-là et le scotch coulait à flots. Je suis sorti du studio définitivement débarrassé de mes complexes. Cette étape franchie, je pouvais laisser libre cour à mon imagination. Dès que je trouvais une progression d’accord, je pense notamment à « Holy Man », je la proposais à Jon et quand j’imaginais un riff, celui de « Mistreated » par exemple, je me tournais automatiquement vers Ritchie. Lorsque Burn est sorti, en 1974, Deep Purple est devenu le plus gros vendeur de disques dans le monde. Nous avions même dépassé les Beatles. Tous les membres et aussi le management ont accueilli cette nouvelle comme un soulagement car malgré les critiques liées au départ de Ian Gillan (chant) et de Rogel Glover (basse), nous étions parvenus à faire mieux encore que le MK II. Nous avons ensuite enchaîné avec une grande tournée mondiale. Les salles affichaient complets. Deux semaines après la tournée, le groupe a repris le chemin des studios pour enregistrer Stormbringer qui a connu le même succès. Ce qui nous a porté pendant ces deux albums, c'est cette complicité extraordinaire. Elle représente l’identité de la 3è formule du groupe.  

    David Coverdale

    Est-ce que l'un des albums enregistrés durant cette période a une signification plus importante pour toi ?

    Je n’ai pas de préférence. Le « Purple Album » est une sélection de chansons que j'ai écrites durant les quatre années passées au sein de Deep Purple. J’aurais aimé ajouter quelques titres supplémentaires de Come And Taste The Band mais quinze morceaux (Note : sur la version Deluxe), c’est déjà beaucoup. Pour moi, c'est un best-of de Deep Purple Mk. III et IV.

    Cet album enregistré au Nevada est plus qu’un simple copier-coller. 

    Certainement. Nous avons abordé le projet avec beaucoup de passion, d’enthousiasme et de respect pour les musiciens qui ont enregistré les titres originaux. Deep Purple c’est un style mélodique, rapide, complexe et virtuose. Quand j’ai formé Whitesnake, je voulais intégrer diverses influences. Le groupe s’est rapidement démarqué par son jeu d’attaque des deux guitares.

    Pour ce disque tu as travaillé avec Joel Hoekstra (ex-Night Ranger) qui remplace officiellement Doug Aldrich au sein de Whitesnake.

    Je n’ai pas dû faire beaucoup de recherche pour trouver un remplaçant à Doug. Joël m’a été présenté par l’animateur radio Eddie Trunk (The Metal Show). J’ai été complètement emballé en découvrant des vidéos sur You Tube. Joël joue principalement sur Les Paul mais il a enregistré plusieurs morceaux de l’album avec une Strat. De nombreux magiciens de la six-cordes se sont proposés spontanément, ce qui est plutôt flatteur, mais il n’y a pas eu d’auditions. Ça fait du bien de tomber sur quelqu’un comme Joël, un fan de rock qui joue simplement pour s’exprimer. Il n’y a pas eu de prise de tête, juste le plaisir de jouer ensemble et s'éclater. Pour moi, les éléments les plus importants restent la confiance, le respect et l’encouragement mutuel. Nous avons également un nouveau claviériste, Michele Luppi (Secret Sphere). Je suis emballé et impatient de partir en tournée avec ce nouveau combo. Pour les concerts au Royaume Uni avec Def Leppard et Black Star Riders, 40.000 tickets ont trouvé acquéreurs en moins de deux jours !

    La réunion de Deep Purple Mk III a avorté en raison du décès de Jon Lord (2012). Il n’y aura pas non plus d’association Blackmore-Coverdale cette année. Qu'est-ce qui cloche?  

    En une courte période mon épouse et moi avons perdu trois êtres chers : son frère, Jon Lord et ma tante Silvia.  Il y avait en quelque sorte un voile noir au-dessus de notre maison. La vie est trop courte et trop précieuse pour n’en conserver que des regrets et des rancunes. J’ai donc décidé d’aller de l’avant et de frapper à la porte des personnes avec lesquels je n’avais plus de contact depuis 30-40 ans, d’anciens amis, des musiciens, dont Ritchie qui  m’a accueilli chaleureusement.  Notre dernière rencontre à l’époque de Deep Purple ne fut pas été très amicale. Il y a eu ensuite la rivalité entre Whitesnake et Rainbow. Nous nous sommes lancés quelques piques par médias interposés. C’est très bien d’avoir pu rétablir le dialogue après toutes ces années. Le décès de Jon a contribué à nous rapprocher. Je ne suis pas quelqu’un de nostalgique mais Ritchie et moi avons essayé de travailler  ensemble, comme je l’avais fait auparavant avec Jimmy Page. Je trouvais intéressant de réenregistrer des standards de Deep Purple, de Whitesnake et de Rainbow en leur donnant une deuxième jeunesse, un coup de peinture fraîche. Cependant après plusieurs réunions, je me suis rendu compte que nous n’étions pas du tout sur la même longueur d’ondes. J’ai donc quitté poliment la table des négociations. Je respecte les choix de mon ancien partenaire mais j’estime aussi avoir des responsabilités vis-à-vis de Whitesnake. J’espère que nous pourrons bosser à nouveau ensemble. Je sais par l’intermédiaire de son manager, que Ritchie a enregistré des idées de riffs et il souhaite que je termine le travail. Je ne sais pas si ces chansons sortiront un jour sur un album, mais c’est une excellente nouvelle. Si ce dernier décide d’enregistrer une plaque électrique, je serai le premier à m’en réjouir.

    Comment envisages-tu l’avenir ?

    Travailler sur The Purple Album fut très symbolique, la boucle est bouclée en quelque sorte. Je pense qu’il s’agit de mon dernier grand projet. J’ai composé, interprété et porté le drapeau du classic rock, du hard-rock et du blues pendant 40 ans. Mon ego a été bien satisfait. Je n'ai plus rien à me prouver aujourd’hui. Je suis ébahi d’entendre Mick Jagger affirmer à 72 ans qu’il ne pense pas à la retraite (il rit). Je déciderai de poursuivre, ou non, ma carrière après la tournée 2015.  

     Whitesnake  : Purple Album

     

    WHITESNAKE

    The Purple Album
    Frontiers / Harmonia Mundi

    Le fan de Deep Purple MK III et IV ne peut que se réjouir de la sortie de cet album hommage proposé par David Coverdale. Le projet ce collaboration avec Ritchie Blackmore étant vraisemblablement « postposé » en raison des sempiternelles hésitations de l’énigmatique guitariste, le grand David a décidé de réinterpréter avec le Serpent Blanc quinze standards du Pourpre Profond, à l’époque où il en était le chanteur (1973-1976). De l’ouverture « Burn » jusqu’à « Stormbringer », en passant par « Lady Double Dealer », « Soldier Of Fortune » « Mistreated » et « Sail Away », les titres sont dotés d’une énergie nouvelle. Outre la voix de Coverdale, toujours gorgée de feeling, les musiciens s’en donnent à cœur joie. En parfaits professionnels, Reb Beech et Joel Hoekstra  ont réalisé des solos digne de Ritchie Blackmore et Tommy Bolin. Un album remake en forme de coup de maître destiné avant tout à promouvoir une nouvelle tournée, et qui ne connaîtra guère de problèmes pour marcher. En somme, une affaire qui rock’n’roule ! [Ph. Saintes 


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