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  • KEE MARCELLO

     Voodoo Child

    Première constatation, Kee Marcello méritait bien plus que cet emploi de simple figurant que lui proposait Joey Tempest au sein d'Europe, après le départ de John Norum en ’86. Ceux qui connaissent les albums Out Of This World et Prisoners in Paradise mais aussi son travail au sein d’Easy Action, le savaient probablement déjà. Le  globe-trotteur suédois nous dévoile tous les secrets de son dernier album mais aussi sa passion pour la mythologie vaudou. [Entretien avec Kee Marcello (chant-guitare) par Philippe Saintes – photos : Kathleen Devai]

                                                                     KEE MARCELLO : live 2016

     

    Kee, peu de gens s’attendaient à un album aussi impressionnant.

    J’ai énormément tourné au cours des deux dernières décennies avec mon groupe, dans des stades, des festivals ou des clubs. Cela faisait un petit moment que je souhaitais sortir un album comme celui-là. J’ai voulu revenir à une écriture intuitive en m’attaquant directement à l’essentiel, sans effets ou samples et le clinquant ou le surcroît d'arrangements. Le son devait être immédiatement reconnaissable. Après avoir collaboré avec Percy Sledge sur son dernier album Shining Through The Rain et offert le tube « Bang Bang Boom » au groupe canadienThe Moffatts,  je souhaitais  revenir à quelque chose de plus organique, à un son vintage avec de vrais instruments, bref je voulais être moi-même sur ce disque. J’ai rapidement pris contact avec les gens de Frontiers, le meilleur label pour ce type de musique. Scaling Up est un peu plus roots que Judas Kiss (2013).

    On trouve quelques morceaux massifs, je pense à « Black Hole Star » et « Blow By Blow ».

    Je suis passionné par les chevaux, et le riff de « Black Hole Star » a surgi de lui-même pendant un concours d’attelage. Le tempo est le reflet de cette course, rapide et intense. Il n’est pas nécessaire d’avoir entre les mains un instrument pour jouer le riff de « Blow By Blow ». Il suffit d’utiliser son organe vocal (il chante l’intro). Cela me fait penser à l’inusable « Smoke On The Water » dont le célèbre riff est facile à entonner.  Pour cet album, je me suis assis et j’ai simplement laissé mes doigts caresser ma guitare. Le refrain de « Don’t Miss You Much » a été composé avec une guitare acoustique. Sur « Fix Me », morceau créé à partir d’un synthétiseur, j’ai ajouté un riff entraînant dans le genre Aerosmith que j’avais dans la tête pour un autre titre. Je suis très satisfait du résultat. J’ai joué à l’inspiration, et le résultat ne s’est pas fait attendre. Il y a un vrai esprit de fantaisie sur ce disque. « Good Man Gone Bad » en est un parfait exemple par son côté hendrixien. J’avais enregistré une ébauche sur mon iPhone, dans un hall d’aéroport. Le solo est un clin d’œil à une de mes idoles, le saxophoniste John Coltrane. Il y a plusieurs changements de tonalité au cours du solo, façon jazz. J’aime changer de modulation. Cela s’entend également sur l’outro de « Blow By Blow ».

    As-tu enregistré toutes les parties de guitares ?

    Oui, les solos et les rythmiques, excepté sur « Good Man Gone Bad » où je partage le solo avec Mattias Eklundh (Freak Kitchen). Nous avons un jeu totalement différent mais cette opposition de style apporte une touche d’originalité, une combinaison harmonieuse.

    Quelles sont les guitares que tu as utilisées pour cet album ? 

    Je reste attaché à la Gibson Les Paul. J’aime le son qu’elle délivre. Je joue les parties électriques sur deux modèles Custom, en noir et « tobacco sunburst », équipés du nouveau système True Temperament qui amène une variante au niveau de la position des frets. Pour l’amplification, je mets des micros Lundgren qui sont les meilleurs au monde. Le Heaven 57 est vraiment extraordinaire. Selon moi il n’y a rien de mieux qu’une Les Paul branchée dans une tête Marshall JVM405.  J’utilise aussi un ampli à modélisation Vox.

    Scaling Up propose aussi des titres très « classic rock ». Sur « Soldier Down » on perçoit l’influence Deep Purple et Rainbow…

    C’est vrai. J’ai grandi en écoutant Deep Purple, je suis un vrai fan ! Il y a deux ans, j’ai eu la chance de jouer avec Ian Paice, Roger Glover et Don Airey à Cagliari, en Sardaigne, lors d’un concert de charité. Le manager de Deep  Purple m’avait appelé la veille pour me proposer de remplacer au pied levé le chanteur Doogy White (ex-Rainbow, Yngwie Malmsteen).  Je devais être à la fois Ian Gillan et Ritchie Blackmore sur scène. Tu peux imaginer ma surprise.  Ritchie Blackmore est la personne qui m'a donné envie de faire ce métier. J’ai répondu spontanément, « Putain, bien sûr que je vais le faire » (rires). J’ai répété toute la nuit car je n’avais jamais chanté les morceaux du groupe auparavant. J’ai donc interprété devant 10.000 personnes « Maybe I’m A Leo », « Highway Star », « Black Night » et « Smoke On The Water », accompagné de mes idoles.  Ce fut une soirée magique ! 

    Kee Marcello live 2016 BW

     

    Tu as dépoussiéré deux démos d'Europe, période 1988-1989.  Les versions originales de « Wild Child » et « Don't Know How to Love No More » n’étaient jamais sorties officiellement.

    Nous avons joué pour la première fois ces titres en public lors d’un concert au Whisky a Go Go (Los Angeles), sous le nom de 'Le Baron Boys' . Il s’agit des outtakes (titres non publiés) de Prisoners in Paradise. Le label Epic, la filiale de Sony aux Etats-Unis, ne pensait qu’en terme de stratégie marketing et se foutait royalement de la musique d’Europe. Cela a altéré nos relations. Lorsque nous avons rencontré les responsables du siège américains pour leur dire que l’on souhaitait une orientation plus direct sur le nouvel album, ceux-ci nous ont répondu : « Carrie » est votre plus grand succès ici. C’est une ballade, on en veut davantage de chansons comme ça. » J’avais envie de leur dire d’aller se faire voir mais le groupe était lié contractuellement et nous étions dans l’obligation de sortir un disque. Ils nous tenaient par les c…. On ne pouvait pas se permettre de perdre des dizaines de millions de dollars dans un procès en refusant tout compromis surtout que nous étions en pleine tournée mondiale. Plusieurs morceaux nettement plus rock sont restés à l’état de démos. Remettre ces deux titres au goût du jour me trottait dans la tête depuis un certain temps. J’ai imaginé le riff et la mélodie tandis que Joey (Tempest) a apporté sa partie, comme pour « Yesterday’s New », titre bonus de l’album Prisonners in Paradise. En fait, j’avais pas mal composé backstage pendant la tournée Out Of This World. Lorsque nous sommes rentrés en studio pour l’enregistrement de Prisonners, j’ai amené de nombreuses idées.

    As-tu gardé des contacts avec  les membres d’Europe ?

    Non, pas vraiment. Je revois de temps en temps Ian (Haugland), mais notre dernière rencontre date de deux ans déjà. Nous sommes restés bons amis. C’est un chouette gars. Il est DJ pour une radio classic rock (Rockkklassiker) à Stockholm. Lorsque je suis de passage dans les studios de cette station, on se croise chaque fois. Je tiens à préciser que j’ai eu les autorisations pour reprendre « Wild Child » et « Don’t Have To Love No More » sur mon album. Il n’y a pas de problème avec les membres d’Europe, tout le monde est content avec cela. J’adore ces deux chansons, mais je les considère surtout comme des titres bonus. Le reste du matériel figurant sur Scaling Up est vraiment différent.    

    Tu as pas mal bourlingué durant ta carrière mais ton cœur est resté en Suède comme l’indique le morceau « Scandinavia » .

    En effet, ce morceau parle du mal du pays. J’ai habité un temps à Los Angeles mais malgré le soleil ce n’était pas le paradis et j’ai senti le besoin de rentrer. Le retour aux sources, c’est aussi le thème général de l’album.

    Quels sont les nouveaux morceaux que tu comptes jouer en public ?

    Nous avons effectué une mini-tournée au Royaume Uni avant la sortie de l’album. Pour des raisons de droit, on a juste interprété deux titres : « Soldier Down » et « Scaling Up ».  Ça me plairait de jouer Scaling Up dans son  intégralité mais je vais devoir choisir avec le cœur. Deux soirées sont programmées pour le lancement du CD, à Göteborg et à Stockholm. On en discutera ensemble avec les musiciens. Je pense toutefois que l’on va jouer 7 ou 8 nouveaux morceaux sur la tournée.  

    Kee Marcello band

    Peux-tu nous présenter les musiciens qui t’accompagnent sur l’album et sur la tournée ?

    Ken Sandin (basse) est mon bras droit depuis 2004. Il est arrivé après la réalisation de Melon Demon Divine. Il y a une vraie complicité entre nous. Plusieurs batteurs se sont succédés au sein du Kee Marcello Band (Mike Terrana, Paul White, Snowy Show, Magnus Persson,…) durant toutes ces années, malheureusement cela n’a pas toujours fonctionné sur le plan humain. Darby Todd est mon nouvel acolyte. C’est un excellent batteur. Son association avec Gary Moore, Robben Ford, Robert Plant et The Darkness, démontre qu’il peut jouer différents styles musicaux. Travailler avec Ken et Darby ne demande aucun effort. On délire et l'on passe des moments forts ensemble. 

    Cela fait très longtemps qu’on ne t’a pas vu en France. C’est prévu pour bientôt ?

    Absolument. J’espère faire quelques dates en France, au Benelux et en Grande Bretagne en mars ou en avril. On va d’abord se rendre en Norvège, au Danemark et en Finlande pour jouer devant 5.000 à 10.000 personnes chaque soir. Ensuite, il y aura la Suède et les îles Féroé. La tournée passera non seulement par l’Europe mais aussi l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud, l’Asie et l’Océanie. Le but du groupe est de tourner le plus possible avec ce nouvel album. 

    Pourquoi avoir appelé ce disque Scaling Up ?

    J’ai discuté avec des collègues de la « mort » du circuit. Beaucoup ont parlé d’arrêter, de donner un concert d’adieu car ils ne se retrouvaient pas dans le formatage commercial et le déclin de l’industrie musicale. Certains ont jeté l’éponge depuis mais pas moi.  Au contraire, j’en veux encore plus, more, more, more (rires). Pas question de baisser les bras, d’où le titre Scaling Up (littéralement « s’élever »).  Je reste optimiste. Les ventes d'albums CD ont augmenté, le vinyle enregistre une hausse impressionnante de même que le streaming dont les revenus dépassent désormais en pourcentage ceux des téléchargements. Les experts qui annoncent régulièrement  la mort du support physique peuvent revoir leur copie. Pour moi, les sites pirates sont voués à disparaître. C’est juste une question de temps et le plutôt sera le mieux.

    Quelle est l’histoire derrière la pochette de cet album ?

    J’avais imaginé quelqu’un grimpant sur une échelle pour illustrer le titre Scaling up (littéralement : à grande échelle). J’ai suggéré au graphiste de mettre le personnage « Papa Legba ». C’est un vaudou, le gardien entre le monde humain et celui des morts. Il est le dieu de la réflexion et des croisements. J’ai été impacté par cette culture lors d’un séjour dans les îles Turks-et-Caïcos (Antilles Britanniques) dans les années ‘90. J’ai aussi des amis dans la communauté haïtienne où le vaudou est un mythe très populaire. J’adore « Papa Legba ». Dans le film Crossroads il apparaît comme le Diable alors qu’au contraire c’est un esprit plutôt bienveillant. C’est lui qui monte sur cette échelle en pointant sa canne vers le ciel. L'atmosphère oppressante qui se dégage de la pochette est un avertissement. Voilà ce qui  nous attend si on ne fait pas attention au risque que le changement climatique nous fait courir. Les  conséquences seront irréversibles.

    N’as-tu jamais été tenté de publier ton autobiographie Rockstjärnan Gud Glömde (« la rock star oubliée de Dieu ») dans la langue de Shakespeare ?

    Une version anglaise était prévue à l’origine mais jusqu’ici personne n’a été capable de traduire correctement l’ouvrage qui a été publié en dialecte de la région de Stockholm avec des citations sex, drugs and rock'n'roll propres à l’industrie musicale. C’est la raison pour laquelle ce mémoire est devenu un best-seller en Suède. Trois personnes ont travaillé sur la traduction mais elles n’ont pas su restituer correctement la saveur du livre. J’envisage donc d’écrire moi-même le texte en anglais en ajoutant de nouveaux chapitres car la 1ère édition date tout de même de 2011. J’y travaille mais pour le moment je n’ai pas beaucoup de temps libres.

    Envisages-tu de rééditer le second album d’Easy Action, That Makes One ? Actuellement, il est mis en vente à…200 euros sur amazon !

    C’est totalement insensé, je sais. Je ne suis pas le raisonnement de ces vendeurs ni comment ils font pour « fourguer » leurs marchandises. J’ai contacté la maison de disque Warner il y a 6 ou 8 ans, mais celle-ci ne souhaitait pas me céder les droits de propriété. Aujourd’hui des versions pirates circulent, principalement en Asie. Je devrais demander à mon avocat d’entamer les démarches pour récupérer les droits et ainsi pouvoir utiliser les chansons comme bon me  semble à l’avenir. Je garde d’excellents contacts avec les membres d’Easy Action. Ressortir That Makes One permettrait surtout de faire dégringoler le prix exorbitant demandé pour cet album sur amazon (rires).

    J’ai entendu dire que tu n’étais pas satisfait de ta participation au morceau « Elephant Man » qui figure sur l’album hommage à Eric Carr (Kiss), Unfinished business ?

    J’ai accepté de participer à ce projet pour honorer la mémoire d’Eric mais le résultat est décevant, il faut bien l’avouer. Je suis d’ailleurs très fâché. J’avais enregistré toutes les guitares d’Elephant Man mais le producteur a décidé de remplacer le solo et la guitare rythmique sans m’en parler. Seule la partie acoustique a été conservée. Cette version est de la merde ! Ce n’est vraiment pas honnête car mon nom apparaît sur le disque et les fans ont réellement crû que je jouais dessus alors que cet enregistrement est une daube. Eric méritait beaucoup mieux. Je regrette de ne pas avoir pu enregistrer ce morceau avec lui, cela aurait été un truc énorme. 

    KEE MARCELLO : Scaling Up - cover

     KEE MARCELLO

    Scaling Up

    Frontiers / Harmonia Mundi

    Nous avions eu un aperçu des qualités de Kee Marcello lors de son passage au sein d’Easy Action et surtout  du groupe Europe entre 1986 et 1992 mais personne ou presque n’attendait le guitariste à pareille fête, 24 ans après son départ de la navette européenne. Il a d’ailleurs exhumé de ses archives deux inédits des sessions de Prisoners In Paradise : « Wild Child » et « Don’t How To Love No More ». Le reste de l’album est tout simplement brillant, du haut de gamme même. Un cocktail à la fois étonnant et détonnant qui emprunte de-ci, de-là à Van Halen (« Fix Me »), Deep Purple (« Soldier Down ») ou Aerosmith (« Scaling Up »). Armé se sa Gibson Les Paul, cet habile six-cordiste nous envoie dans la galaxie du bonheur. Scaling Up cache bien des surprises, avec notamment des titres heavy (« Black Hole Star », « Blow By Blow ») qui mettent en avant les qualités indéniables du Scandinave. Les solos sont exécutés avec beaucoup de feeling. En cela, Kee se situe dans la lignée d’un Gary Moore ou d’un Eddie Van Halen. C’est aussi un vocaliste hors pair. Dès lors, rien ne manque pour vous faire complètement craquer et surtout l’émotion reste intacte après plusieurs écoutes.

    [Ph. Saintes]   

     


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  • EUROPE - Bruxelles, 10 novembre 2016 (1)

    Europe a fait escale à l’Ancienne Belgique le 10 novembre pour son « The Final Countdown 30th Anniversary Tour ». Au cours de cette mini-tournée européenne, le groupe a également joué l’intégralité de son dernier album. Le succès spontané atteste que le courant passe bien, et le public ne tarde pas à se transcender. Avec la voix envoûtante de Joey Tempest, harmonisée avec les claviers de Mic Michaeli et rythmé par la paire John Levén-Ian Haugland, les douze titres de War Of Kings font un tabac incroyable. Ce disque démontre que Europe a pris de la bouteille.

    EUROPE - Bruxelles, 10 novembre 2016 (2)

    EUROPE - Bruxelles, 10 novembre 2016

    Une fois le compte à rebours lancé en deuxième partie de set, le chant de Tempest  s’accompagne d’un bout à l’autre d’un écho en provenance du public devenu communiant. C’est d’ailleurs à l’occasion de « The Final Countdown » que l’assistance connaît le privilège d’un envoûtement express, mais ô combien divin, suscité par la présence hypnotisante de Joey l’enchanteur qui semble fixer en même temps chacune des paires d’yeux qui l’observent. Classiques entre les classiques, « Rock The Night », « Carrie » et « Cherokee » se consomment allègrement. Puis vient le tour de « Danger On The Track, « Ninja », « Heart Of Stone »,… des chansons chargées de cette touche d’émotion répercutée non seulement par le biais des images d’archives qui défilent sur les écrans mais sans doute aussi grâce au feeling de  John Norum, gratteux béni . Le quintet nous balance une dernière fois l’intro de ce bon vieux « The Final Countdown », un tube dont on ne se lasse pas, avant de tirer sa révérence. Un show de près de deux heures qui a transpiré la sueur rock’n’rollienne ! (Phil)

    John Norum - Bruxelles,10 novembre 2016

    John Leven - Bruxelles, 10 novembre 2016

    Mic Michaeli - Bruxelles, 10 novembre 2016

    Photos : © Phil de Fer 2016


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  • GLENN HUGHES

    Goldsinger

     

    L’illustre bassiste/chanteur n’est pas surnommé pour rien « The Voice of Rock ». Ceux qui le verront prochainement sur scène (la tournée européenne vient malheureusement d'être annulée), pourront en témoigner. En attendant, cette voix en or sort un nouvel album solo ou plutôt un nouveau chef d’œuvre. [Entretien avec Glenn Hughes (basse-chant) par Philippe Saintes -  photos : Arnie Goodmann et Georgina Cates ]


    GLENN HUGHES : Live

     

    Ce qui frappe après avoir écouté Resonate, c’est son côté puissant et énergique…

    Absolument. La variété de style est toujours là, mais je sentais que je voulais plus d’énergie et qu’elle était au fond de moi-même. C’est un disque puissant.  Le riff de « God of Money », par exemple est très sombre. On peut également  entendre dans le son de ma voix une forme de colère.  Je deviens un acteur dès que je me retrouve derrière un micro ou dans un studio d’enregistrement. J’aime me transporter dans mes chansons. Je suis convaincu que les fans réagiront positivement. Ils retrouveront les émotions que procurent la musique soul, le blues et bien entendu le rock dur.  A l’exception de « Steady » un titre prévu à l’origine pour l’album du groupe California Breed (2012), toutes les chansons ont été composées au printemps dernier.

    Tu as traversé les décennies avec des fortunes diverses mais ta voix ne cesse de se bonifier. Quel est le secret ?

    Je me repose beaucoup, je fais régulièrement des exercices de réchauffement des cordes vocales et je bois beaucoup d’eau. Maîtriser sa respiration au chant est essentiel. Je chante avec mon diaphragme et non de la gorge. Un examen récent a montré que mes poumons étaient solides.

    « Toujours plus bruyant, toujours plus fort, toujours plus loin », pourrait être ta devise. Tu es apparu  en grande en forme lors des derniers concerts !

    C’est vrai. Tout simplement parce que je suis en paix avec moi-même. Je suis devenu plus zen. J’essaie de me surveiller constamment, un peu comme si je faisais un régime. La méditation m’aide beaucoup. C’est un excellent exercice pour évacuer le stress et retrouver son énergie. Cela m’a d’ailleurs permis de guérir plus facilement et rapidement après avoir été opéré des genoux il y a onze mois. Aujourd’hui je suis en pleine forme, c’est extraordinaire ! 

    GLENN HUGHES : promo

     

    Tu as souvent pris en tournée des musiciens scandinaves, les gars de Europe, JJ Marsh et aujourd’hui Søren Andersen (guitare) et le fidèle Pontus Egborg (batterie)…

    C’est fou, n’est-ce pas ? J’ai habité à Stockholm dans les années ’90 et passé beaucoup de temps à Copenhague. Des affinités se sont formées avec des musiciens locaux au cours de ces différents séjours. J’ai fait le tour du monde, c’est donc effectivement étonnant d’avoir enregistré et tourné pendant tant d’années avec autant d’artistes nordiques. C’est aussi une chance. J’ai pris beaucoup de plaisir à travailler avec toutes les personnes que tu viens de citer.  J’ai rencontré Søren pour la première fois lors d’une convention NAMM (salon de la musique) à Los Angeles, il y a 12 ans. Le courant est vraiment passé à 100% de chaque côté. C’est vraiment un excellent guitariste, compositeur et producteur. L’album a d’ailleurs été enregistré et mixé dans son studio à Copenhague.

    Søren qui te décrit comme a Black man in a White body (« un noir dans un corps de blanc »)…

    Si Søren le dit (il rit) !

    Cette fois encore Chad Smith (Red Hot Chili Peppers) est de la partie…

    Chad et mois sommes très proches. Je suis le parrain de l’un de ses enfants. Lorsque l’on finalise l’écriture des chansons, je sollicite son avis, car il me pousse dans mes derniers retranchements. C’est donc tout naturellement qu’il a accepté de jouer sur Resonate.    

    Un nouvel album du supergroupe Black Country Communion est annoncé en 2017. Joe Bonamassa et toi sembliez pourtant en froid. Qui a fait le premier pas ?

    Joe m’a contacté au mois d ’avril. Lors d’un dîner passionnant et constructif, nous avons décidé de travailler à nouveau ensemble. Joe est souvent passé à la maison ces derniers mois pour écrire de nouveaux morceaux.  Ce sera un disque de rock. Jason (Bonham), Derek (Sherinan) et Kevin Shirley (producteur) sont évidemment de la partie. Le travail de production débute en janvier. Il n’est pas certain que nous entamions une tournée avant l’été prochain compte tenu de mon agenda très serré avec la sortie de Resonate et la réalisation d’un documentaire sur mes tribulations à Jakarta en 1975 (Note : décès de son garde du corps) après un concert avec Deep Purple. Le programme de Joe en 2017 est aussi bien rempli.    

    En parlant de Deep Purple, tu as fait ton entrée au célèbre Rock & Roll Hall of Fame. Pourtant, David Coverdale et toi avez été mis à l’écart pendant la performance live. C’est une déception ?  

    Mon ami David trouvait sympa l’idée de jouer avec Purple. Je lui ai répondu qu’il y avait peu de chance que cela se fasse car je voyais mal Ian Gillan partager le micro. Nous n’avons effectivement pas été autorisés à rejoindre le groupe pendant son tour de chant.  Ce n’est pas grave, je n’ai pas de liens particuliers avec les membres actuels. Le plus important, c’est d’être entré au panthéon du rock. Nous nous sommes bien amusés. David et moi avons d’ailleurs clôturé le gala avec les musiciens de Cheap Trick. Je suis désormais l’ambassadeur du Rock & Roll Hall of Fame. 

    GLENN HUGHES : Live

    On parle beaucoup d’une reformation de Hughes/Thrall pour donner suite au légendaire album éponyme…

    Retourner en studio pour enregistrer un nouvel album reste envisageable. Pat (Thrall) m’a rejoint sur scène, il y a trois mois à Las Vegas. C’était fantastique. Nous sommes toujours bons amis. Je garde d’ailleurs un excellent souvenir de notre première collaboration. Hughes/Thrall est considéré par la critique comme l’un des meilleurs albums de hard mélodique. Pat est un surdoué. Il a manqué ses rendez-vous avec la gloire, mais son talent est incontestable.

    Et en dehors de la musique, quelles sont tes passions ?

    J’adore aller dans mon jardin pour planter de nouvelles choses. C’est devenu un véritable hobby. Et puis, je suis un fan de foot. Robbie Keane, le capitaine des Los Angeles Galaxy, est un ami intime. J'ai beaucoup de considération pour le ballon rond. (Note : les noms de Glenn et de Keane ont été liés au possible rachat de Wolverhampton, club de deuxième division anglaise).

    En tant que citoyen britannique résidant à Los Angeles, comment analyses-tu la campagne présidentielle aux States ?

    Donald Trump a ébranlé les codes de comportement politique en faisant sortir de nombreux démons et Hilary est critiquée pour la légèreté avec laquelle elle a géré un serveur de messagerie privé. Les deux candidats sont au cœur des polémiques. Ce qui m’intéresse avant tout c’est l’avenir de notre planète. Les sujets essentiels comme le changement climatique, la lutte contre la drogue, les abus à l’égard des enfants et la pauvreté sont rapidement passés au second plan.  J’espère sincèrement que la nouvelle administration sera à la hauteur des vrais enjeux mais j’appréhende tout particulièrement le jour du scrutin.

    GLENN HUGHES : Resonate

    GLENN HUGHES

    Resonate

    Frontiers / Harmonia Mundi 

    Huit ans, c’est ce qu’il aura fallu à Glenn Hughes pour sortir un nouvel album solo. Impliqué dans divers projets, « The Voice of Rock » revient cette fois aux sources et à ses vraies passions musicales. Resonate, coproduit avec  le guitariste Søren Andersen, propose douze morceaux teintés de rock, de soul, de Rhythm 'n Blues et de funk. Outre son potentiel vocal, ce vieux Glenn ne laisse pas indifférent par ses qualités de quatre cordiste. Il y a du groove dans chacune des chansons de l’album. La formule guitare-basse-batterie-orgue Hammond fonctionne d’ailleurs à merveille. En invité de marque, on note la présence de Chad Smith (Red Hot Chili Pepper) derrière les fûts sur deux morceaux (« Heavy » et « Long Time Gone »). Enveloppé dans une production carrée, nette et sans bavure, Resonate transpire du sillon sur des compositions de grande intensité (« Flow », « Let It Shine », « How Long »,…) que la voix de ce grand rocker met irréprochablement en valeur. Ça envoie, ça dégage, ça dépote…La preuve que l’artiste arrive encore, à 64 ans, à nous donner des frissons. Il signe en tout cas un album qui comblera tous les amateurs de bonne musique. [Ph. Saintes] 

     


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